La maison forte de la Sallasse

 à 

Barsac

Mémoire de Bommes. Livre 5

REVUE ARCHEOLOGIQUE DE BORDEAUX

TOME LXXXVI     ANNEE 1995

par M. Pierre Coudroy de Lille

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La maison forte de la Sallasse à Barsac.

 

Le Professeur Gardelles avait présenté au 10lème Congrès national des Sociétés savantes, à Lille, une étude : «du manoir au château fort en Gascogne anglaise» au début du XlVème siècle, publiée dans les Actes du Congrès en 1976. 

 Il y analysait la maison forte de la Sallasse, à Barsac, toujours debout, datant à peu près de cette époque.

 

Cette maison forte est assez exceptionnelle par la qualité de ses murs de pierre et par son état de conservation, et d'ailleurs elle est habitée. Son plan rectangulaire est très simple, il n'y a jamais eu de tour; des fossés environnaient l'ensemble.

 

Devant l'absence de documents d'archives, le Professeur Gardelles avait proposé de l'identifier à la maison forte autorisée par le Roi Edouard ler en 1340 au chevalier Gaillard de Tiran.

 

Or une découverte aux Archives Municipales de 13ordeaux, sous cote II 108 nous a permis de faire une identification certaine et de retrouver l'histoire de cette demeure depuis l'origine. En comparant avec les reconnaissances féodales de Barsac sous cote CC 2245 aux Archives Départementales, les titres de la famille de Montferrand IIE 2121, nous avons pu rejoindre les éléments du puzzle dispersé.

Son vrai nom est «la Salle de Villecentut», dit aussi  "la Salle de Hapes», avec des orthographes quelque peu variables.

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 Le nom de la Salasse» apparaît en 1766 c'est celui qui figure sur la Carte de Belleyme ; il semble que ce soit une terminaison péjorative, car en 1766 c'était en partie ruiné, ou tout au moins sans toiture.

 

D'après l'analyse du Professeur Gardelles c'est un bâtiment rectangulaire de 14 x 20 m hors oeuvre, divisé en deux parties inégales par un mur de refend ; le rez-de-chaussée est muni d'une porte et d'une poterne, l'étage est éclairé par trois fenêtres géminées et trilobées très caractéristiques des alentours des années 1300.  

 

 

 

Les angles en pierres de taille sont très soignés, l'appareillage quoique irrégulier est bien réalisé. Une latrine en encorbellement est à l'angle nord-est. La toiture est plus récente.

 

Si le système défensif a disparu, un texte de 1647 mentionne «guérites, mâchecoulis, canonnières, ravelins, douves et fossés qui environnent icelle.

 

L'acte des Archives municipales de Bordeaux II 108 est dans un dossier général sur Barsac; c'est une expédition du contrat passé devant Me Bouton, notaire à Barsac le 28 Septembre 1766 par lequel François Amand de Brassier baron de Beychevelle, Etienne de Brassier son frère et Delphine de Brassier baronne de Budos, leur soeur en tant qu'héritiers de leur oncle le Marquis de Montferrand, vendaient toutes leurs terres à Barsac, Preignac, Pujols et Bommes à Laurent de Sauvage d'Yquem pour la somme de 160.000 livres.

  

-Le détail est intéressant à passer en revue car il montre l'étendue des propriétés, et tous les lieux-dits ont conservé leurs noms d'autrefois. Voici la liste :

 

 

• le clos de Loustauneuf avec vignes

• le clos de la Sallasse auquel lieu est la maison noble

• le clos du Hournau, avec vignes ;

• le clos du Piada avec vignes, maison à 4 chambres

• le clos du Clouziot, avec vignes ;

• le clos du Colombié, avec vignes

• la grange du Port neuf, à Barsac

• la grange du Port, de Preignac ;

 

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et tous les fonds dépendant du moulin et des susdites maisons nobles dans les paroisses de Barsac, Preignac, Pujols et Budos, biens nobles selon les hommages rendus au Roi en 1632, 1684, 1702.

 

Aucune superficie n'est mentionnée, mais cela devait recouvrir un grand territoire ; prise de possession est faite le 4 octobre 1766 devant Me Bouton.

 

A partir de ce nom retrouvé de Villesentut il a été possible de refaire l'histoire de la maison et de son domaine, autrefois très étendu,

 

Le Livre des hommages d'Aquitaine envers le Roi d'Angleterre Edouard ler nous indique que le 22 mars 1274 Pierre de Villecentut et Bernard rendaient hommage pour ce qu'ils tiennent dans les paroisses de Pujols, Barsac, Illats, Preignac ;

 

Amanieu de Villecentut également pour des terres dans le pays de Cernès. Tous étaient chevaliers. Plus tard on trouve Bernard de Villecentut en 1367, Marguerite Parani épouse de Gaillard de Villecentut damoiseau possédant des biens à Budos, Puiols. (Archives historiques de la Gironde tome 22.)

 

Puis nous trouvons ces biens de Barsac mentionnés parmi quelques archives de la famille de Montferrand. (A.D.Gir. Série Il E, n' 2121.)

 

Au XVIe siècle ils appartenaient, au moins en partie à une famille Blanc qui eut une certaine notoriété bordelaise :

 

Noble homme Ithier Blanc, écuyer, sieur de la Salle, fut jurat de Bordeaux en 1515, 1523 ; il eut plusieurs enfants ;

 

Noble Pierre Blanc, écuyer, seigneur de la maison noble de Seguin, à Lignan, qui fut aussi jurat de Bordeaux en 1547, époux de Gratienne de Bourdeaux.

 

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D'où une Fille, Marguerite de Cazalis, qui épouse François de Montferrand, baron de Landiras.

 

Ainsi, passant des Blanc de Seguin aux Cazalis, puis aux Montferrand, nous trouvons la dévolution des héritages de ces biens dans Barsac.

 

Dans le terrier des hommages de la Prévôté dt Barsac de 1647 (A.D.Gir. Cote CC 2245.)

 

Bernard de Montferrand baron de Landiras, seigneur de la Salle de Villecentut évoque l'hommage de son aïeul noble Bernard de Cazalis, et déclare au représentant du

 

 «Villecentut, soit maison, chambre, autres chambres, salles, chay, pressoir, granges, écuries, guérites, mâchecoulis, canonnières, ravelins douves et fossés, füe, bois garenne, prés, aubarèdes, padouens, moulin à eau moulant à 4 meules, soit 155 Journaux de terre et 16 Journaux de prés». 

 

Cela ferait au total, actuellement, environ 54 hectares de superficie.

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 Les biens de Barsac restèrent aux mains des seigneurs d'Yquem.

 

Laurent de Sauvage, l'acheteur, est dénommé dans un acte du 15 janvier 1783 passé par devant Me Saint Marc père, notaire à Podensac «seigneur de Pernaud, Villecentut, Saint Cric et autres lieux».

 

Il mourut en janvier 1787, laissant une seule fille, Joséphine, épouse en 1785 de Louis Amédée Comte de Lur Saluces, qui hérita de tout.

 

Le Comte de Lur Saluces mourut jeune, 3 ans après son mariage, à la suite d'une chute de cheval, à 27 ans, laissant une veuve qui eut du mal à conserver les biens de famille pendant la Terreur.

                      

Elle y parvint, mais dût emprunter en février 1807 la forte somme de 215. 000 francs à un banquier parisien avec hypothèque sur Pernaud et son moulin du Ciron, les enclos de Pernaud, Couloumey, le Closiot, Hourneuf, la Sallasse, Le Piada et les prés et aubarères au bord du Ciron.

 

Les biens de Barsac furent vendus après, et dispersés entre plusieurs familles.

 

 

REVUE ARCHEOLOGIQUE DE BORDEAUX.
TOME LXXXVI     ANNEE 1995

Revue publiée par la Société Archéologique de Bordeaux avec le concours de la Municipalité de Bordeaux. du Conseil Général de la Gironde et de la Direction régionale des Affaires Culturelles d'Aquitaine.

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Réalisée le 20 mai 2002  André Cochet
Mise ur le Web le  juin 2002

Christian Flages

Mise à jour le 

                 

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