Visages
de

Barsac.

Tome I.

Page 75.

 

 

 

 La Tonnellerie à Barsac.
                       

 

 

Dans tous les pays à vignoble, la tonnellerie a eu de tous temps une grande importance.

Dans l'antiquité, la fermentation du moût et la conservation du vin se faisaient dans des jarres et amphores de terre cuite de toutes formes et de toutes grandeurs.  

La création de la futaille, qui remonte aux Gaulois, a permis d'améliorer la vinification; et le vin gagne à être logé dans des fûts en chêne ou en châtaignier; il peut voyager plus facilement que dans des outres et dans des amphores.

La forme et la capacité des futailles en Gironde semble avoir peu varié depuis près de dix siècles; la contenance de la barrique bordelaise est fixée par la loi du 13 juin 1866 à 225 litres, et c'est sur le taux de 225 litres (900 litres, par tonneau) que les achats sont aujourd'hui pratiqués.

Le vin blanc demande à être logé dans des fûts en chêne, dit merrain, importé de Bosnie et d'Amérique; il y gagne du tanin et y vieillit parfaitement.

Mais aujourd'hui, par suite de la rareté des importations du merrain, du prix élevé de la futaille et de l'extension du transport du vin par wagon réservoir et par camion citerne, on vend nu et on fabrique beaucoup moins de tonneaux qu'autrefois.

Il y a cinquante ans, Barsac comptait plus de 300 tonneliers, et les Barsacais se souviennent du temps pas trop éloigné où, dans la plupart des villages, ils étaient réveillés de grand matin par le bruit des marteaux et des tonneaux. 

Ce réveil intempestif a fait dire au poète Armand Gouffré (Le vin de Bourgogne, P. 46).

 

I

J'arrive à Beaune exprès pour boire
Volnay, Vougeot, Pomard et Nuits, 
Pour chanter chaque jour leur gloire 
Et bien dormir toutes les nuits.

II

Sous mon lit, ô surprise ! ô crainte !
L'Enfer ouvre ses ateliers. 
Vive le vin ! Mais, Vierge Sainte, 
Délivrez nous des tonneliers !

Barsac ne compte plus aujourd'hui qu'une trentaine de tonneliers, et on ne trouve plus d'apprentis. Le travail se fait soit en atelier patronal ou au domicile de l'ouvrier, presque toujours propriétaire de ses outils.

Un ouvrier se fait deux barriques par jour, quelquefois trois. Le prix est fixé à la façon; il a varié et donné lieu à de nombreux conflits et notamment à la grande grève d'août 1906 qui s'étendit à toute la tonnellerie girondine. 

Voici quelques chiffres sur ces variations :

 

   

PRIX DE La BARRIQUE en Frs.

Années Façon /barrique  Merrain Vin rouge  Vin blanc
1906 1.50 à 2  12 à 15 60 200
1920 15 à 20  150 à 200 200 1.000
1939 20 à 30 200 à 300 450 1.500
1943 50 à 60  1.500 à 2.000 2.000 15.000
1945 200 à 250 2.000 à 3.000 3.000 15.000
Coeff: augmentation
1906/1945
125 200 50 75

 Ces coefficients d'augmentation sont relativement plus élevés pour la tonnellerie que pour la viticulture.

 

 

 

 

Réalisée le 8 avril  2004  André Cochet
Mise ur le Web le   avril  2004

Christian Flages