La Commanderie

de

Saint Jacques

de

Beaulac

Extrait:

Les CAHIERS du BAZADAIS.

N° 136. Premier  trimestre 2002.

Publié par les Amis du Bazadais.

B.P.34  33430 Bazas.
Sommaire: La commanderie.
Le patrimoine.
La chapelle Saint Jacques.
Le moulin.
Les revenus du Commandeur.
La dîme et autres taxes ou impôts.

Retour au Répertoire.

 

 

La Commanderie.

 

A mi-chemin entre Bazas et Captieux le bourg de Beaulac était réputé jusqu'à une époque récente pour son activité industrielle et ses foires.

(Durant la période médiévale, ce nom de lieu s'écrit Baulad ou Baulatz. A partir du XVIIe siècle la forme gasconne Baulac, que nous avons préféré utiliser, est systématiquement utilisée. Ce n'est qu'à partir du milieu du XIXe siècle qu'apparaît Beaulac, orthographe absurde ayant engendré une légende ridicule : Napoléon I , se serait émerveillé sur un beau lac qui n'a jamais existé.)

Dans la première moitié du XIX, siècle, la création de la fonderie, entraîne son développement alors qu'antérieurement il n'existait qu'un petit hameau composé de trois ou quatre maisons et des bâtiments de la commanderie Saint-Jacques.

(Dans les différents textes exploités nous trouvons mention soit de la commanderie, soit de l'hôpital de Baulac. En 1290, lorsque Edouard I, accorde sa protection, il est explicitement question de l'hôpital Saint Jacques.)

Les restructurations intervenues font qu'il reste peu de traces des constructions primitives. Seul le recours aux sources écrites permet une approche de Saint Jacques de Baulac dont on ignore tout des origines.

Situé sur une des voies menant à Compostelle, (Baulac était situé sur la via Lemovicensis, autrement appelée voie de Vézelay.) l'hôpital existe dès le moyen âge. Les premières mentions connues datent de la seconde moitié du XIIIe siècle, époque ou les Albret font régulièrement des dons aux hôpitaux jalonnant les routes de Saint Jacques. Retour au sommaire.

Ainsi, Baulac bénéficie à deux reprises de legs, en 1262 d'Amanieu VI et en 1308 d'Amanieu VIII.

Edouard I, roi d'Angleterre, duc d'Aquitaine, reçoit à Bordeaux, en 1274, les hommages et reconnaissances des hommes du Bazadais. Le 19 mars, frère Guillaume, précepteur, déclare que tout ce qui dépend de l'hôpital de Baulac est un alleu libre sous la seule autorité du roi d'Angleterre.

Au cours de ces reconnaissances, plusieurs tenanciers disent posséder des terres mouvantes de cet établissement : Doat de Laserte pour des parcelles au casal de Lasertel, ; Jean de l'Aubarède pour des vignes au casal de l'Aubarède7 ; Vital de l'Aubarède pour une terre à la Crenessia8 ; Guillaume de Labad pour quatre journaux de terre9.

(Lasserre et Laubarède font partie des rares noms de lieux cités en 1274 parvenus jusqu'à notre époque.)

Le roi-duc renouvelle, le 24 août 1290, la protection accordée par son père, Henri III, au précepteur et aux frères de l'hôpital Saint Jacques de Baulac.

L'ordre du Saint-Esprit de Montpellier revendique la commanderie, en 1372. Des documents du XVIIe siècle, évoqués plus loin, signalent une provision, en mars 1473, en faveur d'un religieux du Saint-Esprit et indiquent que Baulac dépendait autrefois de l'ordre de Saint-Jacques de l'Epée Rouge (olim de spiti rubes).

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(L'ordre du Santiago ou de Saint-Jacques de l'Epée Rouge créé en 1170 en Espagne est constitué en ordre militaire et religieux dans le but de conduire la guerre contre les sarrasins et d'assurer la défense des pèlerins et l'hospitalité.)

En 1523, 1533 et 1535 dans le compte des décimes levés dans le diocèse de Bazas pour financer les guerres de François I, le prieur de Baulac contribue pour le prieuré mais également pour le bénéfice de Saint-Exupère, vraisemblablement Sauviac et celui d'une chapelle Saint Antoine de Casteljaloux, ce qui pose problème car il ne semble pas y avoir eu d'édifice de ce nom dans la cité lot-et-garonnaise.

Les quelques mentions évoquées ci-dessus confirment l'existence de l'hospitalet mais n'apportent aucun renseignement sur sa structure.

Nous supposons que quelques frères dirigés par un prieur accueillaient les pèlerins et soignaient les malades.

Rien ne nous indique, avec certitude, de quel ordre ils dépendaient, cependant, dès le moyen âge la commanderie paraît organisée, des terres en dépendent, le prieur reçoit des dons et perçoit des redevances.

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Le legs fait par Amanieu VI en 1262 est double de ceux faits aux autres hôpitaux des routes de Saint Jacques, les contributions du début du XVIe siècle sont nettement supérieures à celles versées par l'archiprêtre de Bernos, nous en déduisons que le prieuré de Baulac avait une certaine importance.

A partir de la fin du XVI, siècle, même si certaines périodes paraissent obscures, nous commençons à mieux connaître la commanderie.

De 1594 à 1620 deux ordres se disputent la possession de Baulac:

-les Antonins d'Aubeterre établis à Saint-Antoine près d'Aubeterre-sur-Dronne.

La commanderie générale d'Aubeterre se trouvait sur la rive gauche de la Dronne, face à Aubeterre, paroisse de Mirand, actuelle commune de Cumond en Dordogne. Une quinzaine de commanderies subalternes en dépendait dont celle de Pondaurat en Bazadais.

-les Feuillants de Bordeaux, installés dans cette ville depuis 1589, dépendant de l'ordre de Citeaux.

En juillet 1591, Antoine Prevost de Sansac, archevêque de Bordeaux, donne le prieuré Saint-Antoine de la Palomère, laissé à l'abandon par les Antonins, à la congrégation des Feuillants.

Le 18 novembre 1594, ces derniers prennent possession d'un autre prieuré bordelais, Saint-Martin du Mont judaïque. L'acte dressé par Me Boyne, notaire à Bordeaux, nous apprend qu'une bulle du pape, en date de juin 1594, autorise l'union du prieuré Saint-Martin avec celui de Baulac au diocèse de Bazadois.

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Jehan de Lucmajour, bénéficiant jusqu'alors des revenus de la commanderie, vraisemblablement en tant que fermier, conteste cette attribution et prend possession du prieuré le 25 janvier 1595.

Les Lucmajour étaient seigneurs de Barbuscan, paroisse de Sadirac, actuelle commune de Grignols.

Les Feuillants engagent alors une procédure qui aboutit en janvier 1596 à un arrêt du Grand Conseil de Paris, siégeant à Bordeaux, les maintenant en possession de Baulac.

Le lieu est éloigné de Bordeaux, les droits mal connus des nouveaux propriétaires. En août 1597, le chapitre des Feuillants se réunit et délègue une personne pour

"faire exporler et recognoistre tous et cbacuns les emphytéotes et tenanciers du dict prioré de Baulac et aultres lieux dependans d'icelluy...

Le terrier établi, non retrouvé dans le cadre de cette étude, doit lui être remis.

La procédure entre les deux ordres continue cependant.

Les Feuillants semblent avoir réalisé d'importants travaux dans le prieuré Saint-Antoine de la Palomère, dont l'attribution est confirmée par un arrêt du parlement de Bordeaux en 1600.

Le 18 août 1603 un échange intervient entre Antoine de Collet, commandeur d'Aubeterre qui reçoit Baulac en Bazadais, prieuré paraissant procurer de meilleurs revenus que celui de Saint-Antoine conservé par les Feuillants.

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Le Saint Siège ne ratifiant pas cette transaction, les Feuillants continuent à percevoir les revenus de l'hospitalet, certainement affermés à des particuliers.

Ainsi, la famille de Lucmajour, contestataire en 1595, gère à nouveau la commanderie dès 1638.

Guillaume Louis de Lucmajour, qui se dit commandeur de Baulac, est inhumé dans le choeur de l'église Saint-Martin de Bazas le 24 juin 1644.

En 1654, ce titre est porté par Jean Partarieu, en 1660, par Jean Baritaut.

Par la suite, Baulac semble délaissé par ses propriétaires, et, le 8 juillet 1677, un arrêt de la chambre royale condamne son administrateur à se désister au profit de l'ordre de Saint-Lazare.

(L'ordre de Notre-Dame du Mont-Carmel et de Saint-Lazare de Jérusalem est fondé au début du XIIe siècle et consacré aux lépreux. Des déclarations de 1674, puis 1682, lui dévoluent tous les hôpitaux destinés à recevoir les pèlerins de Saint Jacques.)

Le 23 mars 1678, les revenus de la commanderie sont affermés". En 1685 le fermier doit fournir un écu tous les mois à tous les pèlerins allant ou venant de Saint-Jacques ou autres passants nécessiteux au nombre de quinze maximum.

Puis, le 16 décembre 1695, sur les conseils de monseigneur de Gourgues, évêque de Bazas, une ordonnance royale incorpore la commanderie Saint Jacques de Baulac à l'hôpital Saint-Antoine de Bazas.

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Durant un siècle, l'hôpital de Bazas, où s'installent à partir de 1698 les Filles de la Charité, compagnie créée par saint Vincent de Paul en 1633, gère la commanderie et les droits qui en découlent.

Le conseil d'administration, également appelé bureau de direction, nomme un syndic chargé, entre autres, de la gestion de la propriété de Baulac où les soeurs de Bazas semblent se rendre régulièrement.

Le 6 avril 1792 les congrégations religieuses sont supprimées, puis leurs propriétés confisquées comme biens nationaux.

Le 28 brumaire an III (18 novembre 1794) une délégation composée de trois experts, des citoyens Cholet, maire de Bernos, et Courregelongue, officier municipal, se rend à Baulac afin de réaliser une estimation.

Deux lots sont formés. Le premier apprécié à 16.000 livres comprend le moulin, une maison d'habitation servant au meunier, les écuries, une chambre de maison séparée, les terres et le pré de Carroy.

Le second lot, estimé 2.700 livres, comprend "la maison qui était cy-devant chapelle de là commanderie" et un journal de terre.

La vente aux enchères se déroule le 9 pluviose an III (28 janvier 1795).

Pour le moulin lès premières offres faites par les citoyens Lapeyre et Fage sont comprises entre 30 000 et 40 000 livres.

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Deux personnes renchérissent au deuxième feu: un nommé Lacroix et Jean Laboyrie, meunier du lieu.

Plusieurs feux seront nécessaires pour départager les intéressés.

Le huitième feu éteint, Jean Laboyrie se voit adjuger la propriété pour une somme de 63.700 livres, soit quatre fois plus que la valeur de l'estimation effectuée deux mois plus tôt.

Il acquiert également l'ancienne chapelle pour un prix de 9.000 livres.

Le nouveau propriétaire exerce comme meunier jusqu'à son décès survenu le 13 thermidor an XI (10 août 1803)

Ses huit enfants réalisent un partage des biens en 1812.

Le fils aîné, Jean, hérite du moulin, son frère Jacques de la maison dite de la chapelle.

Jean Laboyrie aîné décède en 1829, sa veuve semble alors quitter la commune.

Etienne Gaulin, aubergiste, achète le moulin en septembre 1836 et le transforme en forge, fin 1837. Les fonderies de Baulac qui feront la réputation de ce hameau voient le jour.

La commanderie Saint-Jacques de Baulac, seigneurie de très faible étendue, dont nous venons d'évoquer les propriétaires successifs, possède une réserve et différents droits procurant des revenus au commandeur.

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Si le moulin existe toujours, si l'emplacement de la chapelle est parfaitement identifié, il ne subsiste aucun vestige de l'hospitalet. Dans la seconde partie de cette étude nous évoquons chaque bâtiment et essayons de définir le territoire de la commanderie et les droits du commandeur.

Le Patrimoine.

Au fil des siècles, les hostilités franco-anglaises, les guerres de religion, la décadence des ordres religieux, provoquent une désaffection pour le pèlerinage vers Compostelle.

Les ordres se succèdent, ne résident pas et n'assurent plus l'accueil des pèlerins et l'entretien des bâtiments.

Dès la fin du XVIe siècle, le bénéfice est affermé, les revenus de la commanderie ne servent plus à l'hospitalité.

Baulac connaît la même destinée que bien d'autres hôpitaux.

Nous devons souligner les similitudes concernant l'appartenance et le devenir avec le site de Sainte-Madeleine de Bessaut, dont des ruines subsistent près de Lencouacq dans les Landes : référence à un passé santiaguiste, possession par l'ordre du Saint-Esprit, attribution en 1677 à l'ordre de Saint-Lazare et incorporation en 1695 à l'hôpital de Mont-de-Marsan.

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L'hospitalet n'existe plus en 1677 lors de l'intégration de la commanderie à l'ordre de Saint-Lazare. L'enquête réalisée à l'époque auprès des habitants montre qu'il existait anciennement un hôpital destiné à accueillir les pauvres et les pèlerins allant à Compostelle.

Les témoignages montrent que l'hospitalité n'est plus assurée depuis environ trente ans et que les bâtiments sont démolis. L'enquêteur se rend sur les lieux et constate que sur le chemin allant de Baulac au moulin subsistent des ruines.

De l'autre côté de ce chemin se trouve une chapelle dans laquelle il n'y a plus de service religieux. L'hôpital semble désaffecté depuis environ 1650. En 1683, Pierre Labrousse, marchand, achète aux Lazaristes "la place ou était autrefois l'hôpital".

Les Labrousse semblent s'implanter à Baulac à cette époque. Négociants, aubergistes, ils sont, un siècle plus tard, les plus importants propriétaires du secteur. En 1831, pratiquement tout le quartier de Baulac leur appartient.

La comparaison entre le cadastre napoléonien et le relevé des propriétés effectué en 1673, l'exploitation des actes notariés concernant Baulac permettent de définir l'emplacement approximatif du bâtiment.

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Plusieurs propriétaires édifient des constructions avant 1831, année de confection du plan napoléonien :

Baulac d'après le plan cadastral de 1831.
Pour voir le plan en plein écran.

-la veuve Gaulin sur une prairie, située entre la grand route existante et celle projetée, acquise en 1818 à Jean Labrousse (parcelle C 754);     

-Jean Loubrie, sur un terrain cédé, en 1816, par Jean Courregelongue

Ces données nous donnent une idée de l'aspect du bourg de Baulac au XVIIe siècle qui a peu changé depuis 1673, année ou trois propriétaires sont recensés:

Barthélemy Lagardère possède alors une propriété d'un seul tenant avec plusieurs maisons dont une à Baulac confrontant du couchant au chemin public de Baulac à Langon et Bazas.

Ces biens intègrent le patrimoine de la famille Larrouy par le mariage de Marie Lagardère avec maître Pierre Larrouy procureur au présidial de Bazas, puis celui de la famille de Marbotin, propriétaire en 1831, par le mariage de Jeanne Larrouy-Beaulac avec Jean Baptiste François de Marbotin. Parcelle C 767.

Jean Dulau, notaire royal, possède une maison et un jardin confrontant du levant et midi à un chemin public, du couchant et nord à sieur Jean Vidal.

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Cette propriété fait l'objet d'une vente, le 30 juin 1704, par Jean de Ports époux de Catherine Dulau à Pierre Labrousse. Parcelle C 763.

Le sieur Jean Vidal, receveur à Baulac possède deux métairies confrontant du levant au chemin public allant de Bazas à Baulac et au jardin de maître Jean Dulau, midi au grand chemin et à la rivière du Ciron.

Ces locaux sont cédés à la famille Labrousse avant 1775, époque où Pierre Labrousse loue "la grande auberge" à Antoine Budos.

L'auberge est vendue en 1818 à Jacques Morou, une maison d'habitation à Bernard Chaulet en 1824 qui la revend en 1825 à Jean Courregelongue Parcelle C 756, 758.

La propriété de la commanderie, non répertoriée en 1673, car certainement exemptée de taille, est constituée de l'hospitalet, du moulin Parcelle C 772.et du bâtiment de la chapelle Parcelle C 769.

Baulac au début du XIIe siècle.
Pour voir le plan en plein écran.

Par déduction, il semble que le terrain vendu en 1683 à Pierre Labrousse, sur lequel s'élevait l'hôpital de Baulac, correspond aux parcelles C 760 et C 761 appartenant en 1831 à Antoine Saint-Pé Labrousse.

Nous n'avons répertorié aucun acte soit de vente, soit de location pour ce local qualifié de "maison de maître" de la famille.     

Sur place il n'existe aucune trace des constructions d'origine et l'actuelle propriétaire n'a jamais trouvé lors des travaux de réfection ou d'entretien de vestiges permettant de conforter cette hypothèse qui remet en cause la tradition populaire situant l'hospitalet à l'emplacement de l'auberge de l'Espérance Parcelle C 767.

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La chapelle Saint-Jacques,

 Parcelle C 769, dont on remarque encore la porte d'entrée et la présence de trois baies obstruées, est transformée en maison d'habitation dès le début du XIXe siècle.

Façade de l'ancienne chapelle
 de la commanderie de Baulac, 
à gauche du chemin 
conduisant à l'ancienne fonderie.

A proximité existait un cimetière cité dans un acte d'échange en 1634, par lequel jehanne Labé cède 

"tout le droit qu'elle peut prétendre au lieu et place ou estoit cy devant une maison pres le sepmitière de l'église chapelle de la communauté de Baulac".

Après cette date nous ne trouvons plus aucune mention de ce cimetière et les registres paroissiaux de Bernos n'indiquent aucune inhumation à Baulac. La découverte d'ossements, au cours de ce siècle, près de l'emplacement de la chapelle prouve l'existence du site.

Dans l'acte d'échange nous notons la mention d'un chemin "vieux roumieu", appellation qui correspond aux itinéraires fréquentés par les pèlerins de Compostelle.

Ce chemin passait au couchant d'une parcelle au lieu dit les Baries.

Ce nom de lieu existe encore en 1831. Nous supposons que ce chemin disparu venait de Conques ou de Cudos.

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Des cérémonies religieuses sont célébrées dans la chapelle, après autorisation de l'archiprêtre de Bernos, jusque vers 1700, notamment deux mariages, le premier le 30 octobre 1695 entre Jean Dubosc et Catherine Belloc, le second le 15 avril 1698 entre Jean Daney et Marie Lajauné.

Par la suite ce lieu de culte semble abandonné car, en novembre 1769, Bertrand Léglise, meunier, loue le moulin et l'ancienne chapelle à l'exception de deux chambres réservées aux soeurs de l'hôpital Saint-Antoine lorsqu'elle se rendent à Baulac.

Acquise comme bien national par la famille Laboyrie, la maison dite de la chapelle est cédée en 1815 à Jean Courregelongue, propriétaire en 1831.

Le moulin,

 Parcelle C 772, seul vestige de la commanderie, vraisemblablement fortifié à l'origine, considérablement remanié à des fins industrielles, a conservé son implantation d'origine.

Tout au long du XVIIIe siècle l'hôpital de Bazas assure l'entretien du bâtiment.

En 1749 un nouveau canal d'amenée des eaux est réalisé et une troisième meule construite.

En 1765 "des voyes d'eau traversent le moulin", celui-ci paraît être en "grand danger". Les revenus de l'hôpital ne suffisant pas pour effectuer les réparations, le syndic avance la somme nécessaire.

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En 1782, Jean Laboyrie, nouveau meunier, constate que le moulin ne peut fonctionner correctement.

Maître Jacques Mullot, syndic, se retourne contre les sieurs Basterot et Labrousse anciens fermiers pour défaut d'entretien.

Chaque partie nomme des experts, un état des lieux est dressé le 18 janvier. Les experts désignés par les parties adverses constatent qu'une seule meule fonctionne correctement et que les deux autres doivent faire l'objet d'une réfection totale.

Nous ignorons qui a financé les travaux mais ceux-ci ont certainement été réalisés car, par la suite, il n'en est plus question. En 1783, le chemin conduisant de la grand route au moulin est refait.

L'intendant de Guyenne, lors d'une visite à Baulac, constate l'insuffisance des aménagements et alloue une somme de 400 livres pour poursuivre le pavage du chemin sur une longueur de 44 toises (180 mètres) et une largeur de 2 toises (4 mètres).

La location du moulin de Baulac se fait par voie d'affiches en faveur du plus offrant. Le moulin est très prisé par les meuniers au XVIIIe siècle essentiellement pour les droits rattachés à la commanderie dont le preneur bénéficie.

Le moulin de Baulac
Façade ouest.

 

Les contrats d'afferme ont une durée de trois ans au XVIIe siècle, de cinq ans jusque vers 1730, puis de 9 ans dans la seconde moitié du XVIIIe.

Les améliorations citées engendrent une augmentation du prix de location qui passe de 730 livres en 1737, à 970 livres en 1752 et atteint 1.500 livres en 1769.

Ce dernier montant paraît excessif car le preneur, Bertrand Léglise, résilie le bail deux ans plus tard. Par la suite la valeur se stabilise à 1.200 livres.

La réserve, d'une faible contenance, se situe de part et d'autre du Ciron. La famille Laboyrie qui achète les biens de la commanderie durant la période révolutionnaire en est toujours propriétaire en 1831.

Seules les parcelles C 776 et C 777 ont fait l'objet d'une revente depuis l'acquisition.

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Antérieurement, à deux reprises, la réserve a fait l'objet d'aliénations : lors de la cession de l'emplacement de l'hôpital, en 1683, et au moment de la vente, en 1641, d'une parcelle sur laquelle existait une maison à Jehan Mussos.

Les superficies cédées semblant peu importantes, nous pouvons en déduire que la propriété s'étendait, rive droite, sur environ trois hectares.

Face au moulin, rive gauche, le pré de Carroy, d'une contenance de trois hectares, appartenant aux Feuillants de Bordeaux en 1673, est vendu vers la fin du XVIIe siècle à Jean Baptiste Chollet de Lascaban qui le loue aux meuniers de Baulac, puis le cède à la famille Labrousse.

Par la suite l'hôpital Saint-Antoine cherche par tous les moyens à récupérer ce bien. Une promesse de vente est faite par M. Labrousse en 1752, l'autorisation royale n'est obtenue qu'en 1765 et la vente conclue le 24 février 1769.

En 1788, Jacques Mullot, syndic, fait rechercher par l'intendance de Guyenne le relevé des propriétés établi en 1673 car il soupçonne un voisin des fonds de la commanderie d'avoir usurpé du terrain.

Le folio concernant le moulin de Baulac n'étant pas retrouvé, l'affaire reste sans suite.

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Etendue de la seigneurie.

En l'absence de terrier il est peu aisé de connaître avec précision le territoire de la seigneurie. Les transactions intervenues au XVIIe et XVIII siècles aux alentours de Baulac nous renseignent sur les mouvances de différents seigneurs.

La seigneurerie de la Commanderie
 de Baulac
 XVIIe - XVIIIe siècle.
Pour voir le plan en plein écran.

 Cependant, la rectification de l'emprise de certains chemins, les ventes relatives à des métairies disparues, la modification des noms de lieux, rendent cette approche difficile.

En ce qui concerne les maisons, plusieurs actes, toujours suivis de reconnaissances, nous indiquent que des redevances sont dues au commandeur de Baulac:

-dans le hameau, même en 1704, la vente, Pons-Labrousse déjà citée ;

-la transaction, en 1733, concernant l'auberge du Jallat, entre la famille Partarieu et François Labrousse.

-la cession, en 1739, de la métairie de Illiot, par les Partarieu à Jean Courregelongue.

-l'achat en 1758, par Dominique Viamoret aux héritiers Vidal, de la métairie de Thillot.

-l'acquisition, en 1762, par la famille Viamoret aux héritiers Brana de la métairie de Bouliche.

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La métairie de Bernadet, vendue en 1749 par Jean Latrille à Jean Cabirol et celle de Champignon cédée en 1773 par Jean Dubernet à Dominique Viamoret, mouvantes de l'hôpital Saint-Antoine n'ont pu être situées.

D'autres seigneurs détiennent des droits à proximité de Baulac:

Seigneuries voisines de la Commanderie.
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1. Terres mouvantes de la Commanderie.
2. Chapitre Cathédral.
3. Marquis de Castelnau.
4. Marquis d'Illon.
5. Syndic de Prévôté.

-le syndic de la prévôté de Bazas sur le moulin de Ladils qui appartenait jusqu'en 1624 aux pauvres de l'hôpital Saint-Antoine.

"Ce moulin est appelé aujourd'hui Chaulet, nom des meuniers qui y ont exercé durant plus d'un siècle. Ladils évoque le nom d'une importante famille bazadaise au moyen âge."

-le chapitre cathédral à Laboup, Lartigue et Lasserre.

-le marquis d'Illon à Hachon, au Calongeat et à Larroc.

-le marquis de Poudenas, seigneur de Castelnau-de-Mesmes, à Tierrouge qu'il cède à fief nouveau à Pierre Roumazeilhes, notaire, en 1759.

La propriété de Laubarède, constituée d'une maison de maître et d'un logement pour les métayers, vendue en 1768, par Jacques Rideau à la famille Labrousse, dépend de trois seigneurs différents, le chapitre cathédral certainement pour la partie proche de Lasserre, le marquis d'Illon pour les biens situés à l'ouest, la commanderie pour les terres au midi du chemin du Calongeat.

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Pour les parcelles mouvantes de la commanderie, seules ont été retenues sur la carte des seigneuries celles pour lesquelles existent des confronts à des chemins identifiés:

-à Peyronnet, les terres situées de part et d'autre du chemin de Baulac à Bernos et confrontant du couchant au chemin de Ladils.

-à la Place et au Buc, les parcelles situées à l'est du chemin menant de Hachon à la fontaine du Buc semblant être le même que celui de Ladils. Les parcelles à l'ouest du chemin dépendent du marquis d'Illon.

-à Thillot et Bouliche le grand chemin de Bazas à Baulac passe au couchant des parcelles alors qu'il se trouve actuellement au levant.

La vente de biens "autrefois traversés par le chemin ancien de Bazas à Beaulac" confirme que ce dernier a été dévié au début du XVIIIe siècle.

-aux Baries, une parcelle confrontant au nord le chemin de la Rouquette.

-au Tauzin, une pièce de terre confrontant du midi au Ciron, du couchant à la commanderie, du nord à un chemin venant de Baulac.

Nous n'avons trouvé aucune transaction concernant les deux plus importants propriétaires du quartier, les Larrouy-Beaulac et les héritiers de maître Pierre Vidal notaire royal, mais nous supposons que leurs biens, vu la proximité de Baulac dépendaient de la commanderie.

L'emprise d'origine devait séparer le territoire de la commanderie de celui du chapitre de Bazas.

En conclusion, il semble que la seigneurie s'étendait sur une superficie d'environ 130 hectares, limitée au nord par le chemin du Calongeat et, celui de l'église de Bernos à celle de Cudos, à l'est par la limite de paroisse et le domaine de Tierrouge, au sud par le Ciron et à l'ouest par l'ancien chemin de Bazas au moulin de Ladils.

Ce territoire de très faible étendue se limite à Bernos car les métairies situées à Cudos, proches de la limite de paroisse (Coutreu, Dron) dépendent du chapitre cathédral.

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Les revenus du commandeur.

Comme nous l'avons vu, depuis la fin du XVIe siècle, le bénéfice de la commanderie, affermé, ne sert plus à l'hospitalité des pèlerins. L'arrivée à Bazas des Filles de la Charité va permettre de destiner, à nouveau, les revenus à une oeuvre charitable : les soins aux pauvres.

Durant la période moderne il n'est plus question des revenus de Sainte Exupère ni de ceux de la chapelle Saint Antoine de Casteljaloux.

Les actes de la fin du XVIe siècle indiquent que le commandeur perçoit la dîme du vin et un dimon paroisse de Bernos, un dimon au quartier de la Fille, paroisse de Saint Michel de Castelnau.

A toute seigneurie foncière se rattachent d'autres redevances notamment la rente versée au seigneur par les tenanciers en échange de la jouissance du sol et les droits de lots et vente, taxe de 10 %, perçue au moment des mutations.

Il est, malheureusement, difficile de connaître les revenus procurés, les sources d'informations étant très éparses.

Au XVIIe siècle des actes différents sont établis pour la location du moulin et l'afferme du droit de dîme, le commandeur semblant se réserver la rente et les droits de lots et vente.

Dès que l'hôpital Saint Antoine prend en charge la propriété, l'ensemble des droits est affermé avec le moulin, ce qui explique le montant élevé du loyer par rapport à certains moulins du même type.

Comparaison du prix de location de divers moulins :

Le tableau précédent montre que Baulac se loue au moins trois cent livres de plus que les autres établissements et, durant la Révolution, le double du prix de Labarie et l'Auvergne qui ne possèdent cependant que deux meules.

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La dîme et autres taxes ou impôts.

La dîme du vin de la paroisse de Bernos ne concerne que la rive droite du Ciron, celle des quartiers de Labé et du Boscage étant perçue par l'archiprêtre de Bernos.

Au XVIIe siècle le fermier de la dîme effectue un versement en argent, celui du moulin un paiement en denrées, situation ne permettant pas d'effectuer de comparaison. Ainsi, en 1640 Bertrand Bordes verse 130 livres", en 1660, Gailhard Darquey, 159 livres".

Ces sommes paraissent conséquentes : à la même époque les moulins du secteur se louent entre 300 et 400 livres, une métairie en dessous de 100 livres.

Le seul document permettant d'appréhender la superficie des vignes est le cadastre napoléonien.

En 1831, on petit estimer que cette culture, pratiquée sous forme de joualles, couvre pour l'ancienne paroisse de Bernos environ cinquante cinq hectares, soit huit pour cent du territoire.

Le fermier règle le montant de l'afferme en deux échéances, la première pour les fêtes de Noël, la seconde pour la Saint Jacques.

Nous n'avons aucun renseignements sur le dimon de la paroisse de Bernos qui semble être attaché à certaines parcelles.

L'acte de sommation, en 1638, de Raymond Bouldey, fermier des fruits décimaux de Bernos, contre le commandeur montre que ce dernier s'est approprié la dîme de parcelles relevant de l'évêché.

Nous ne connaissons pas d'actes relatif au dimon du quartier de la Fille, qui, d'après la carte de Cassini est seulement composé de trois métairies et d'une vaste étendue de landes, ce qui laisse supposer des revenus modiques.

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La rente annuelle due par les tenanciers est systématiquement mentionnée dans les actes de transaction entre particuliers. Là encore, nous ne pouvons connaître les revenus procurés par cette redevance.

Au XVIIe siècle une dizaine de propriétaires possède des biens à Baulac.

La plus grande partie du territoire est répartie entre trois familles :

les Lagardere de Cudos dont un membre est notaire royal ;

les Vidal, notaires à Baulac ;

les Partarieu, habitant successivement Bazas, Castillon et Langon.

Les autres possesseurs de biens se concentrent dans le quartier de Bouliche et Thilot, à l'époque le plus important de la paroisse.

En 1673, au moins huit maisons y sont recensées, alors que Bernos n'en compte que cinq, Baulac quatre.

Nous sommes en présence d'un hameau avec son auberge (Le Jalla), où exercent des artisans tels un forgeron, un charron, un tailleur d'habits.

Les droits de lots et vente sont systématiquement perçus au moment des mutations de propriété.

Chaque acte notarié est suivi, au XVIIIe siècle, d'une reconnaissance à l'hôpital Saint Antoine mentionnant les droits prélevés au nom de la commanderie par le meunier.

Même si les transactions sont peu nombreuses l'apport pécuniaire n'est pas négligeable.

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Ainsi joseph Laqueyrie, preneur du moulin en 1729 pour une somme annuelle de 730 livres perçoit 205 livres, en 1733, au moment de la vente de l'auberge du Jalla et 150 livres, en 1739, lors de la vente de la métairie de Thilot.

Nous n'avons pas retrouvé les actes concernant la cession de l'auberge de Baulac et celle des biens de la famille Vidal aux Labrousse mais ces transactions semblent avoir été réalisées à l'époque où joseph Laqueyrie était meunier puisqu'en 1737 Jeanne Esterlin, veuve Labrousse possède déjà les trois maisons de Baulac.

Au XVIIIe siècle, malgré le prix élevé de la location, il semble que les meuniers tirent largement profit de leur passage au moulin de Baulac et des revenus de la commanderie.

Nous ignorons la destinée de la plupart de ces familles mais celles que nous connaissons (Darquey, Chaulet, Laboyrie) figurent au XIXe siècle parmi les plus importants propriétaires de la commune.

Cette étude concernant la commanderie de Baulac mériterait d'être approfondie notamment pour la période médiévale qui semble avoir connu l'apogée du site.

Espérons que de nouveaux documents viendront la compléter. Comme nous l'avons vu le seul bâtiment encore existant est le moulin.

Malheureusement, depuis la cessation d'activité de la fonderie, celui-ci ne fait plus l'objet d'entretien et sa structure se dégrade irrémédiablement.

La situation est regrettable car il s'agit d'un des derniers moulins de la vallée du Ciron ayant conservé son aspect primitif.

La fonderie, témoignage de l'activité industrielle de la vallée au début de ce siècle, n'aurait-elle pu être sauvée de la ruine à une époque ou les acteurs de la vie locale s'orientent vers une activité nouvelle pour la région, le tourisme.

Jean Michel SOLANS

 

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Réalisée le 30 août  2002

 André Cochet

Mise sur le Web   septembre  2002

Christian Flages

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