La vie religieuse et paroissiale

de

Louis XIV à Napoléon III

à

 BALIZAC.

 

 

Conférence

par

 M. Jean DARTIGOLLES.

 à

Balizac le 15 mars 2003.

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Sommaire: Introduction La Révolution
  Accueil d'un nouveau Curé Rétablissement du culte.
  Procès pour un testament Recherche de prêtre
  Le Sacristain Réception d'un Cardinal
  Le presbytère Le Curieux Curé Boulmié

 

 

 

Introduction.

 

 

Depuis le moyen âge, et on ne sait trop pourquoi, la nomination des Curés de Balizac ne dépendait pas de l'Archevêché de Bordeaux mais directement du Pape en cour à Rome.

 

Balizac n'a jamais redouté les situations d'exception…..

 

Et ceci a duré jusqu'à la révolution. Cette situation était, en effet, exceptionnelle.

 

Essayons d'y voir un peu plus clair.

 

C'est le Pape Clément V, natif d'Uzeste qui, tout au début du XIVème siècle avait fondé une collégiale en sa paroisse natale.

 

Et il y avait installé comme son nom l'indique, un collège de Chanoines qui vivaient là en commun sous la direction d'un doyen. Ils vivaient en milieu ouvert et n'étaient absolument pas enfermés comme l'auraient été des moines.

 

Comme ce collège avait été fondé par le Pape et à ses frais, il était, au fil du temps, toujours resté directement rattaché à Rome. Pour le choix et les nominations de ces Chanoines c'était le marquis de Pons, Seigneur de Villandraut qui proposait les candidats au Pape qui, s'il était d'accord, prononçait leur nomination.  L'Evêque de Bazas en était simplement informé pour mémoire.

 

Or, on ne sait trop pourquoi la paroisse de Balizac qui, elle, appartenait à l'Archidiocèse de Bordeaux était rattachée au Collège des Chanoines d'Uzeste et ses Curés successifs pareillement nommés par le Pape lui-même.

 

Par contre, une fois en place, pour tout ce qui concernait les cérémonies, la liturgie, la catéchèse, etc.… le Curé obéissait bel et bien aux instructions de l'Archevêque de Bordeaux. La particularité ne portait donc que sur sa nomination.

 

Au moment ou commence notre histoire nous sommes au soir du 22 septembre 1719, c'était un vendredi, le Curé Antoine des Roches venait juste de mourir à l'âge de 68 ans. Il était là depuis la fin du règne de Louis XIV. On l'enterra dès le lendemain comme c'était alors la coutume.

 

Ses obsèques solennelles se déroulèrent en présence de tout le village assemblé ainsi que de tous les Curés des paroisses voisines et de Bernard Dubaquier vicaire du défunt Curé, car il y avait un vicaire alors à Balizac.

 

Après ce décès on vit arrivé le Curé Dufoure nommé par le Pape comme il se doit. Installé à Balizac en 1719, il devait y rester jusqu'en 1747. A cette date, fatigué, peut-être, il manifesta son intention de se retirer. Le 28 mai 1747 il présenta sa démission au Pape qui l'accepta et nomma à sa place Jean Roudés qui desservira Balizac jusqu'à sa mort survenue en 1788.

 

Ce Jean Roudés était précisément l'un des Chanoines d'Uzeste et il avait démissionné de sa charge pour venir à Balizac. En avait-il assez de vivre en communauté ? Préférait-il être Curé Indépendant ? Il ne nous a pas laissé ses confidences, mais c'est bien à sa demande qu'il est venu à Balizac. Il prend possession de sa paroisse le 8 novembre 1747.

 

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Accueil d'un nouveau Curé.

 

Tous les habitants sont réunis dans l'église en présence de Me Lafourcade, notaire à Balizac, car il y avait un notaire à Balizac.

 

Sous le porche de l'église, Me Lafourcade prend le Curé par la main et le fait entrer. Le Curé prend de l'eau bénite, se signe, remonte la nef, monte à l'autel, se met à genoux et prie quelques instants. Puis il baise l'autel, ouvre le tabernacle et se dirige vers le missel (qui est installé sur un pupitre) et là, il lit quelque prière. Il passe ensuite dans la sacristie où se trouve une grande armoire neuve où sont rangés les ornements qu'il inspecte. Il revient enfin à la porte d'entrée et prenant les cordes en main, il sonne les cloches. Me Lafourcade dresse ensuite de tout cela un minutieux procès-verbal qui nous a été conservé.

 

Le Curé Roudès va ensuite prendre possession de son presbytère. Mais là, c'est une tout autre affaire ! Sa prise de possession sera purement symbolique car il n'y a plus de presbytère à Balizac.  

 

Et probablement depuis pas mal de temps. Ce bâtiment, complètement détruit, n'a pas conservé pierre sur pierre. A-t-il brûlé ? Rien ne le dit. A-t-il subi les rigueurs de la guerre ? Mais il y a plus de cent ans qu'il n'y a pas eu de troubles dans la région. La vérité est que nous n'en connaissons pas la raison.

 

Par contre, grâce à la description de Me Lafourcade nous connaissons bien l'état de ces ruines

" des anciens murs de la maison presbytérale"     nous dit-il

"il n'y a que des vestiges…n'y paraissant seulement que quelques pans de matériaux de muraille, ras de terre, tous les autres matériaux ayant été enlevés depuis longtemps."  

 

Il est clair que cette ruine a servi de carrière à qui a eu besoin de pierre. Et depuis longtemps dit Me Lafourcade qui est un bon témoin. Il est un bon témoin parce qu'il habite au bourg et qu'il voit bien ce qui s'y passe et parce qu'il a un certain âge au moment où il écrit.

 

Au surplus nous disposons d'un autre texte, de 1728 écrit par le Curé Dufoure, le Curé précédent, qui dit clairement que vingt ans auparavant ce presbytère était déjà inhabitable. C'était donc une situation très ancienne.

 

Alors s'il n'y avait plus de presbytère où donc le Curé et son Vicaire pouvaient-ils se loger ? Eh bien dans une maison que l'on avait loué pour eux tout en haut du bourg, au lieu que l'on appelle encore , et pour cause, "La Vielle Cure".

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Seulement voilà, au début de 1748, le propriétaire de cette maison vint à la vendre et le nouveau Curé Roudès qui venait tout juste d'arriver (il y avait quelques mois) allait se retrouver à la rue. Des décisions urgentes s'imposaient donc. Le Syndic de la paroisse, Jean Callen, réunit tous les paroissiens devant la porte de l'église à la sortie de la messe le 19 mai1748.

 

C'était le dimanche juste avant l'Ascension et il leur adresse le discours suivant:

"Depuis bien longtemps nous sommes obligés de payer un loyer de maison à notre Curé, et quoiqu'il soit modique, il se rencontre souvent des difficultés pour le recouvrement de son paiement…Il n'y a par ailleurs qu'une seule maison dans la paroisse qui puisse être louée pour loger ce Curé et ladite maison vient d'être vendue par le propriétaire de telle façon qu'il sera presqu'impossible que notre Curé puisse être logé dans notre paroisse....."  

 

Ce loyer, nous le savons par un autre texte, étaient de 30 livres par an, soit à l'époque le prix d'une barrique de vin rouge de Landiras ou de Budos. Quand aux difficultés à le payer, elle devaient être bien réelles puisque dans une lettre à l'Archevêque de Bordeaux, le précédent Curé Dufoure se plaignait déjà d'avoir à le payer de sa poche.  C'est donc tout dire…..

 

Le problème ainsi posé, les paroissiens discutèrent et finirent par décider de:

"faire construire incessamment une maison presbytérale…  sur le même emplacement qui est près de la présente église."

 

Et pour ce faire, ils décidèrent de faire établir un devis estimatif et chargèrent Jean Bourrut de négocier avec l'administration de l'Intendance à Bordeaux la création d'un impôt local spécial sur Balizac dont ils décideraient eux-mêmes le montant et dont ils géreraient le produit pour payer ces travaux.

 

Ce Jean Bourrut, dit Jeantillon, était le meunier du moulin de Balizac aujourd'hui disparu qui était installé sur la Nère pas très loin de Pinot.  

 

Ainsi fut fait et c'est l'origine du presbytère que nous connaissons aujourd'hui. Mais sa construction pris du temps, beaucoup de temps. 8 ans plus tard, en 1756 le Curé Roudès rapporte dans une lettre que sa construction est toujours en cours. Et pourtant, la caisse de la Fabrique paroissiale de Balizac ne devait pas être totalement dépourvue.

 

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Procès pour un testament.

 

 

C'est toute une histoire….

 

Figurez-vous que le Curé Des Roches, celui-la même que nous avons enterré tout à l'heure, en septembre 1719, avait fait un testament.  Et dans ce testament, ce brave Curé avait légué à sa paroisse une somme de plus de 500 livres, somme considérable représentant alors la valeur d'un troupeau de 200 moutons. C'était pour Balizac une bien belle aubaine mais, l'héritier naturel du Curé, Monsieur Pineau ne l'entendait pas de cette oreille et ne versa pas un sou de cette somme à la paroisse.

 

Et Monsieur Pineau n'était pas n'importe qui car il était conseiller à la Cour des Aides à Bordeaux, autrement dit,  juge. Juge à ce que nous appelons aujourd'hui la Cour des Comptes régionale. Pour un magistrat royal cela faisait passablement désordre.

 

La Fabrique de l'église de Balizac l'attaqua en justice devant le Sénéchal de Bordeaux car il ne pouvait être question d'attaquer un magistrat de ce rang devant une justice locale.

 

Ce procès traîna longtemps si bien qu'entre temps, Monsieur Pineau mourut et qu'il fallut recommencer les poursuites contre ses héritiers. Mais Balizac ne baissa jamais les bras et de procès en procès et d'appel en appel finit par l'emporter.

 

La dernière part de son dû, pour solde de tous comptes lui fut versée le 9 octobre 1742, 23 ans après la mort du Curé donateur.

 

Cet argent aurait pu être bien utile pour construire le presbytère 6 ans plus tard en 1748. Il n'en est pourtant question nulle part. Qu'en ont-ils fait ? Mystère…. Une telle somme aurait pourtant pu favoriser l'entreprise. Au demeurant il semble qu'il y ait eu quelque tiraillement dans la direction des affaires paroissiales.

 

Voilà qu'au printemps 1751, Jean Callen, le Syndic fait connaître qu'il démissionne de sa fonction de Syndic, sans en préciser la raison. Une Assemblée des Paroissiens réunie à la sortie de la messe du 29 juin 1751 accepte cette démission et désigne Arnaud Dubourdieu pour lui succéder. Cet Arnaud Dubourdieu habitait au Hat.

 

Les comptes de Jean Callen sont approuvés et l'on compte 381 livres dans la caisse. Personne, pour autant, ne parla de les affecter au presbytère dont la construction avait été décidée il y avait déjà de cela 3 ans et qui, nous venons de le voir il y a un instant, ne serait pas encore terminée avant 5 ans.  

 

Là-dessus survient l'affaire du sacristain qui montre bien que les relations entre le Curé et le nouveau Syndic ne sont pas au beau fixe. 

 

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Le Sacristain.

 

 

La chose mérite d'être contée.

 

Dans toutes les paroisses de la région la fonction du Sacristain sonneur de cloches, était chaque année, mise à l'adjudication. Chaque paroissien pouvait pousser les enchères pour acheter cette fonction à la Fabrique. Après quoi, celui qui l'avait emportée recevait pour un an les clés du clocher en échange du versement du montant de son enchère. Ensuite tout au long de l'année il percevait à son profit de chaque famille le montant des prestations qu'il fournissait:

Le tout selon un tarif déterminé et connu de tous. Suivant le montant auquel il avait poussé l'enchère annuelle et le nombre des cérémonies le Sacristain pouvait gagner de l'argent ou bien en être pour sa peine et de sa poche.

 

A Balizac, cette mise aux enchères s'effectuait, traditionnellement, le jour de Pentecôte à la sortie de la Grande messe, un peu avant midi. Le 2 juin 1754, jour de Pentecôte, on s'était donc réuni selon l'usage et les enchères commencèrent. Elles se révélèrent sans passion car les candidats ne se bousculaient pas.

 

Seuls se manifestèrent, Bertrand Darcos le Sacristain sortant qui était un assez modeste charron et Jean Roumazeilles dit Pézoune qui était, lui aussi, charron (car il y en avait deux à Balizac) mais dans une situation nettement plus confortable car il était, aussi propriétaire.

 

Ce fut Roumazeilles qui l'emporta pour 15 livres, somme modeste puisque l'année précédente l'enchère avait atteint 21 livres. Quoi qu'il en soit, on prit donc Roumazeilles pour Sacristain et on lui remit les clés du clocher.

 

Mais le Curé Roudès n'avait pas assisté à ces enchères parce, que nous dit-il, "il s'était retiré en sa maison car c'était l'heure de son déjeuner…" argument cousu de fil blanc, vous vous en doutez bien, car il ne pouvait ignorer que l'on allait procéder à l'enchère à la porte de l'église.

 

Lorsqu'il apprend que Roumazeilles a remporté cette enchère il entre dans une colère noire, tout simplement parce qu'il ne peut pas le souffrir en peinture depuis que dans on ne sait plus trop quelle circonstance il lui aurait manqué de respect. Il s'ensuit toute une histoire dans laquelle le Curé, à grand renfort de papier timbré entre en procès avec ses paroissiens exigeant que Roumazeilles rende les clés du clocher.

 

Le Syndic Dubourdieu est hésitant. Il soutient d'abord la démarche du Curé puis s'en désolidarise et se retire du procès pour confirmer tout bonnement Roumazeilles dans sa fonction de Sacristain.

 

Je vous laisse imaginer quel a pu être le climat dans la paroisse dans les temps qui ont suivi avec un Curé qui ne pouvait pas voir son Sacristain et qui serait en conflit permanent avec le Syndic administrateur des biens de la paroisse. Il a dû y avoir là de mauvais moments à passer.

 

Ambiance ou pas, le Curé Roudès fut le premier à habiter le presbytère que nous connaissons aujourd'hui, il demeura à Balizac jusqu'à sa mort, à la veille de la Révolution au printemps 1788.

 

C'est Me Jean Antoine Pradier qui lui succéda. Il venait de bien loin puisqu'il était prêtre du diocèse de Mende, ce qui n'était évidemment pas la porte à côté. Mais ce n'est pas un cas isolé car Balizac est parfois allé chercher ses Curés très loin. Nous en retrouverons un exemple tout à l'heure.

 

Le Curé Pradier pris possession de son église le premier juin 1788 et ici encore nous disposons du procès-verbal très précis de cette cérémonie. Mais Me Lafourcade n'était plus là, il était mort dans l'intervalle et il n'y avait plus de notaire à Balizac.

 

On avait donc fait appel à Me Audinet notaire à Préchac que l'on avait fait venir pour consigner les détails de l'événement sur lequel nous ne nous attarderons pas parce qu'il est en tous points identique à celui que nous avons décrit lors de l'arrivée du Curé Roudès avec toutefois la particularité qu'il peut, cette fois-ci visiter le presbytère qui a été reconstruit.

 

Le visiter, oui mais l'habiter,  non, du moins pas encore car il est encore occupé par les domestiques de son prédécesseur, une servante et un valet de ferme qui gardent le mobilier qui n'a pas encore été déménagé.  

 

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Le Presbytère.

 

Le nouveau Curé voudrait bien entrer dans les lieux le plus vite possible et pour cela il remue ciel et terre.

Il intervient:

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Réalisée le 20 avril 2003  André Cochet
Mise ur le Web le        2003

Christian Flages

Mise à jour le 

                 

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