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Recueil      
  des      
    Brochures et écrits 
     

publiés

 
   

depuis 1839 jusqu'à ce jour  (1880.)

   

Henry de Lur-Saluces.

Dates.

Titre. Pages.

17 juill 1860

Circulaire 

190/192.

 aux électeurs du canton de Podensac.

 

Messieurs,

L'élection du canton de Podensac a pris un caractère de rivalité de clocher qui est déplorable, parce que cette rivalité n'a aucune raison d'être.

Je suis sans doute partie intéressée dans le débat et néanmoins je crois pouvoir vous parler sur ce sujet avec un sang froid et une impartialité que je réclame et que j'espère obtenir de chacun de vous.

Lorsque des intérêts vraiment contraires sont en présence, cette rivalité est fort naturelle et elle est même souvent légitime.

Ainsi, pour citer de grands exemples près de nous : lorsque Bordeaux et Libourne étaient en désaccord sur la question de Cubzac ; lorsque la rive droite et la rive gauche de la Garonne étaient en concurrence pour le tracé du chemin de fer, etc., l'opposition des intérêts était évidente et la lutte logique.

Mais ici l'opposition n'existe heureusement sur aucun point, et en vérité c'est ne pas parler sérieusement que de soutenir le contraire.

Ainsi, par exemple, pour le changement de chef-lieu de canton, que vous dirai-je ?

Si, ce n'est que j'hésite à vous entretenir de cette assertion, tant elle me paraît ridicule et absurde.

Page 191

Au reste, Messieurs les électeurs, je puis en bien peu de mots vous fixer sur ma manière d'envisager mes devoirs en tant que conseiller général, si vous me confiez cette mission.

Toutes les communes, du canton, aussi bien celles qui auront voté pour moi que celles qui auront vote contre, peuvent compter sur mon zèle pour défendre leurs réclamations légitimes, mais celles-ci seulement.

Ainsi, il est une question qui préoccupe un grand nombre de propriétaires, c'est celle du classement de la route de Sore à Saint Symphorien et Podensac, voici à cet égard ce que je pense : cette route est le complément des routes faites ou projetées dans les grandes landes ; elle met le port de Podensac, et par suite Bordeaux, en rapport avec les produits de contrées qui sont déjà riches et qui tendent à le devenir chaque jour davantage.

Son intérêt prend donc une importance qui dépasse celle qui s'attache à un intérêt cantonal.

C'est vous dire que je ferai ce qui dépendra de moi pour conduire cette affaire à bonne et prompte solution.

Maintenant, Messieurs les électeurs, abandonnons les questions d'intérêt local et passons à un ordre d'idées que j'appellerai d'un ordre supérieur, d'accord avec vous, je n'en doute pas !

J'ai, je le dis très haut, une foi entière dans l'excellence du régime représentatif.

Je crois qu'il importe que les citoyens s'occupent avec ardeur du choix de leurs mandataires.

La force et le zèle de ceux-ci sont doublés par la lutte, et la somnolence dans les positions acquises est funeste aux mandataires et aux mandants. Mais il importe aussi que les électeurs prennent au sérieux leur mission.

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Je pense donc qu'il est très légitime que vous préfériez un candidat à un autre, parce que vous croirez le premier plus actif et plus intelligent que le second, parce que vous le saurez plus indépendant et plus libre, parce qu'il vous aura été recommandé par quelqu'un en qui vous aurez confiance, enfin parce que ses opinions connues ou celles que vous lui supposez sont les vôtres ; mais je ne comprends pas qu'on puisse mettre en avant avec succès des assertions déraisonnables dans le genre de celles que j'ai réfutées plus haut.

Il me semble, et je le dis à regret que c'est manquer d'égards pour le corps électoral que de chercher à agir sur lui par de semblables moyens.

Messieurs les électeurs du canton de Podensac, remarquez bien ceci !

Une parole mémorable a été prononcée, l'histoire l'a enregistrée et elle ne périra pas !

La liberté est le but !!!

Or, pour vous, la liberté est le but ; mais elle est aussi le moyen, puisque l'autorité, pensant avec raison que vous étiez les meilleurs juges dans la circonstance présente, n’a pas cherché à diriger votre choix.

Il importe donc au plus haut degré que cette élection s'accomplisse avec calme et dignité. Elle servira ainsi à répondre à ceux qui prétendent que les français ne sont pas mûrs pour la pratique de la liberté.

Je finis, Messieurs, cette longue lettre en revenant au sentiment sous l'impression duquel je l'ai commencée.

Nommez qui vous voudrez, mais sans passion, et surtout sans rivalité de clocher, car véritablement ici, c'est folie !

Toutes les communes du canton sont soeurs.  Pour moi, je vous le dis en toute sincérité, je maudirais le jour où j'aurais accepté la candidature, si ce jour là devait être le point de départ d'une division entre elles !

 

 

 

Table des matières.

Réalisée le 10 septembre  2005  André Cochet
Mise sur le Web le  septembre  2005

Christian Flages