Genèse de son Altesse
 le vin.
 

CHARLES DORMONTAL.

Lauréat de l'Académie Française.

1932

EDITIONS DES ROSES

23 rue du Hautoir.  BORDEAUX

 

 

 

 

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LE CIRON.

 

 

 Le propre de cette rivière, c'est qu'elle revêt tous les aspects, prend toutes les couleurs et toutes les formes, sans jamais dépasser les proportions, qu'elle semble s'être imposées de mesure et de goût.

 

Si vous êtes chasseur ou pêcheur, les bords du Ciron vous offriront bien des surprises. Si vous êtes un simple touriste, un amateur de paysages, un rêveur, alors vous pouvez lui demander toutes les émotions délicates, toutes les impressions souriantes que des fleuves majestueux et des rivières fameuses n'ont jamais réussi à vous procurer.

 

Tandis que le batelier suit les méandres du courant avec une connaissance profonde des ensablements, des passages, nous allions dire : « des passes » les tilleuls, les branches forment un dôme.

 

Quelques racines énormes décorent la rive.

Les rochers moussus font une harmonie verte et grise avec les rameaux.

Et le charme de la petite rivière opère doucement, comme si le Grand Dessinateur de paysages s'était plu, dans ce microcosme, à rassembler quelques-unes des plus sobres et des plus fraîches sensations de nature.

Au-dessus de la rive, c'est la lande avec ses fougères géantes, ses genêts, ses pins saignés par l'homme. Si par hasard vous accostez, vous êtes frappé par le contraste entre ces terres farouches, hostiles, qu'anime seule parfois la chasse à la palombe, et la grâce simple mais si prenante du Ciron.

 

D'année en année, le sable qui coule des rives fait un lit plus brillant et plus épais au courant qui roule sur fond d'or ses replis d'argent. Quelques troncs çà et là s'effondrent, hélas! minés par les eaux. 

 

Cette admirable page de nature se dérobe encore un peu, comme Galatée fuyant sous les saules, pour être cherchée...

 

Paul BERTHELOT.

 

DE POURPRE ET D'OR.

 

Gironde, paradis qu'irrigue un fleuve roi,

Groupés sur tes coteaux par grâce héréditaire,

Campent, pieds tors, les ceps, vrais gardiens de la Terre

Qu'ils couvrent, dès l'avril, du plus pompeux arroi.

 

Septembre, thyrse en dextre et chamarré d'orfroi,

Visite chaque vigne et préside au mystère.

D'écume tonne et rit le rituel cratère

Quand râlent les raisins dans la gloire et l'effroi.

 

Vieillesse, en élixirs, muez ces jus suaves :

Bordeaux, l'Entre deux Mers, Saint Emilion, Graves,

Médoc, pourpre bouquet, Sauternes, geste d'or.

 

Religieusement que la coupe s'élève

Où rutile d'esprit et d'audace et d'essor

Le vin qui met la vie à l'échelle du rêve.

 

Armand GOT.

 

 

 

GLOIRE AU VIN DE BORDEAUX.

 

Raisins du pays de Bordeaux,

Lourds de sucs rubis ou topaze,

Le soleil vif qui vous embrase

Sertit en vous ses clairs joyaux.

 

Au lit d'arômes des tonneaux

Votre liqueur ne dort mais jase

Pour que la pourpre ou l'or d'extase

Rutile des flacons royaux.

 

Gloire aux Saint Emilion, Graves,

Médoc, Sauternes, crus suaves,

Fleurons du bachique blason !

 

Salut divin nectar du monde,

O vin de rêve et d'oraison,

Ambassadeur de la Gironde.

 

René ROUGERIE.

 

 

 

 

VINS DE LA GIRONDE.

 

Qu'ils soient rouges ou blancs, chauds, secs, doux, capiteux,

Couleur de pourpre ou d'or, les vins de la Gironde,

Pour leurs riches vertus sont les premiers du monde :

Par eux l'adulte est fort et le vieillard joyeux.

 

A la table opulente, où tout charme les yeux,

Le triomphe des mets, sur ces grands vins se fonde,

Et le dîner de style où le confort abonde,

Ne doit son franc succès qu'au rang des crus fameux.

 

Sans les riches Médocs, les Graves, les Sauternes,

Lafitte, Haut Brion, grand Yquem, seraient ternes

Les festins qu'un Vatel dresserait pour des rois;

 

Et le docteur en vogue ajoute à l'ordonnance,

Pour son convalescent, en précisant son choix,

Seul un vin de Bordeaux parmi les vins de France.

 

Suzanne RAMBAUD.

 

 

 

SAUTERNES.

 

Orgueil de la Gironde, ô pays de Sauternes,

Si jadis eût brillé ton éclat radieux,

Ton nectar eût coulé sur la table des dieux

Horace aurait pour toi délaissé le Falerne.

 

Ta gloire, c'est le monde entier qui la décerne,

C'est lui qui t'a sacré roi des vins merveilleux,

Et le plus grand parmi tes rivaux orgueilleux,

Mis à côté de toi, n'est plus qu'un subalterne.

 

Château d'Yquem, Vigneau, Suduiraut, La Tour Blanche,

Quand votre jus doré dans les verres s'épanche,

Un rayon de soleil réchauffe tous les cœurs.

 

Car vous portez en vous les vertus de la race,

Et c'est à votre sève, ô divines liqueurs,

Que nous devons l'esprit, la bravoure et la grâce.

 

Jean Paul BRUNET.

 

 

 

 

VINS DE BORDEAUX...

 

Vins de Bordeaux, maîtres de poésie...

Tendre Barsac, doux souffleur de musette,

Vous l'astrologue, impénétrable Yquem

Qui redonnez d'un seul coup de baguette

Un teint de vierge au vieux Mathusalem,

Marquis Sauterne à la perruque blonde,

Sur un plateau, portant parmi les blés,

Ton frontignan qu'aux premiers jours du monde

Un dieu remplit d'un jus d'astres foulés !

André BERRY.

 

 

LES GRAVES...,

 

Dont les raisins pressés portent telle ambroisie,

Que, soit vin grec, vin sec, vin d'Andalousie,

Angevin, Phalermois, ou vin de Malvoisie,

En piquante douceur ne s'approche du tien...

 

P. de BRACH.

 

 

 

LES GRAVES.

 

Des chasseurs cependant la troupe rassemblée,

Autour d'un déjeuner gaîment s'est installée.

La coupe se remplit d'un vin apéritif,

D'un froit trop rigoureux, heureux palliatif

C'est le vin de Cérons, de Calvimont, d'Anice,

Des repas du matin habituel délice.

Du nectar précieux, la céleste chaleur,

Ranime leur gaîté, redouble leur valeur...

 

Pierre BIARNEZ.

 

 

 

D'AMBRE ET D'AMBROISIE.

 

      A M. LE VICOMTE DE ROTON,

« PRINCE DES NECTARS ET DES GEMMES »

                AU RAYNE-VIGNEAU.

 

Jus de gemmes puisé dans le coeur des agates,

Douce sève d'orgueil fleurante d'aromates

Où le soleil s'infuse en sirop d'ambroisie,

Quintessence ravie aux vieillesses des grappes,

Je te salue, ô vin dont rêvait Esculape

Sauternes, don doré, délice, poésie...

 

Armand GOT

 

 

 

 

LES VINS De SAUTERNES.

 

Des lieux où le Ciron en serpentant bouillonne

Et vient mêler son onde aux flots de la Garonne,

On voit se dessiner, en groupes gracieux,

Les monts où s'élabore un nectar précieux.

A droite on aperçoit la sinueuse chaîne

Bordant, comme un feston, le fleuve d'Aquitaine

A gauche, des coteaux qui, bornant l'horizon,

Paraissent dérouler des tapis de gazon.

De gothiques châteaux, élevés sur leur crête,

Au loin de leur pignon montrent le sombre faîte,

Que leur nom soit modeste ou leur blason altier,

Chacun d'eux est fameux dans l'univers entier.

Qu'ici le voyageur en passant se prosterne,

Car ces coteaux sont ceux de Bomme et de Sauterne.

Sauterne ! à ce seul nom le gourmet enflammé

Sent déjà son palais de parfum embaumé.

Là, dans un humble cep, la puissante nature

Cache de ses esprits l'essence la plus pure,

La distille aux rayons d'un soleil glorieux

Et, par mille détours, divins, mystérieux,

Conduit dans nos celliers cette source bénie

Où l'homme va puiser la force, le génie.

Un essaim de follets enfermés dans ce sol,

Chaque automne, en riant, de là prennent leur vol

Et, nourris dans son sein, d'une flamme féconde

Vont porter le bonheur, la joie autour du monde.

 

Pierre BIARNEZ.

 

 

 

 

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Réalisée le 7 juin 2004  André Cochet
Mise sur le Web le      juin 2004 Christian Flages