Plaidoyers pour l'adjonction
de
 PUJOLS sur Ciron 
à
 l'appellation BARSAC. 

Sommaire: Lettre de Jean Louis LACOSTE.

Archives: Pierre DUCOURNEAU.

Considérations. Argumentaire.

1929

        Lettre de l'Abbé BELLIARD.
Carte Géologique.

Carte Topographique.

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SYNDICAT VITICOLE DE PUJOLS SUR CIRON.
(GIRONDE)

LETTRE
à

Monsieur Marcel Gounouilhou

Président du Syndicat Viticole de Barsac

SUIVIE DE

Considérations sur l'adjonction de Pujols sur Ciron

à l'appellation BARSAC .

PAR

Jean Louis LACOSTE

Architecte

Membre fondateur du Syndicat Viticole de Barsac.

Président du Syndicat Viticole de Pujols sur Ciron.

BORDEAUX            1929

IMPRIMERIE ROUSSEAU FRÈRES  6, Rue de la Merci, 6

             

A Monsieur Gounouilhou.  Président du Syndicat Viticole de Barsac.

 

MONSIEUR LE PRÉSIDENT,

 Permettez qu'au nom du Syndicat Viticole de Pujols sur Ciron nous adressions à votre bienveillance et à votre impartialité quelques considérations qui, transmises par vous à votre Syndicat, peuvent amener une conciliation d'où sortirait, dans un avenir prochain, pour nos deux communes une situation viticole améliorée.

Nous nous sommes fait un devoir de vous tenir constamment au courant de notre action dans la lutte. menée par nous pour faire rentrer notre commune dans une région dont elle devrait faire partie, si des fins égoistes et un aveugle parti pris contraires à tout intérêt général n'y avaient pas mis d'empêchement. 

Notre but, c'est de créer une région « Barsac » dans laquelle nous serions compris, et qui serait vraiment une exacte expression géographique. Croyez-vous, Monsieur le Président, que cette région « Barsac » serait trop étendue ? 

Elle ne peut comprendre en réalité que l'aire de production située sur nos deux communes dont parle la loi du 12 juillet 1927, qui considère l'aire de production comme le facteur principal d'une appellation.

 Nous sommes privés de notre légitime appellation faute d'usages que le hasard ne nous a pas donnés, alors que d'autres communes éloignées de l'aire de production obtiennent gain de cause, elles pourraient même être plus éloignées, dans des terrains pires, donnant un mauvais produit, que le résultat serait le même par la seule application de ces usages.

L'ancienne loi de 1919 non abrogée, comme celle de 1927 qui la complète, présentent cet inconvénient, de ne pas garantir une délimitation. On le voit bien pour « Sauternes », l'autorité, judiciaire appliquant la loi étend cette délimitation outre mesure, lorsque en réalité cette région ne devrait comprendre que quatre communes (nous mettons Barsac à part quoique faisant partie de ce groupe comme ayant une marque propre). 

Pourquoi rejeter dès lors au point de vue de la marque « Barsac » ce lambeau de territoire qu'est Pujols sur Ciron qui perd ainsi de sa valeur intrinsèque, et qui compléterait l'unité de cette belle région naturellement délimitée.

 Si nous considérons un autre point de vue, les faits constants sont tels qu'une partie importante du vin de Pujols sur Ciron va dans les communes classées du Sauternais, surtout à Barsac. Il ne reste ainsi que 1.650 hectolitres dans notre commune en année moyenne.

Ces 1.650 hectolitres vont aux commerces qui les livrent aux consommateurs. Comment ? surtout sous une appellation facile à deviner, mais jamais sous le nom de Pujols sur Ciron inconnu partout.

Notre revendication juste, adéquate au sol, mettrait de l'ordre dans notre région, ferait cesser cette anomalie des terres argilo-calcaires tenant à celles de Barsac sur toute l'étendue de contact des deux communes rejetées dans les "Graves", se trouvant au-delà de marais et de bois considérables.

 Les cartes que nous vous avons envoyées en temps voulu, l'une établie d'après le cadastre, l'autre d'après la nature géologique du sol, montrent la superposition de l'aire de production des vignes sur le plateau calcaire, c'est-à-dire la vérité dont ou s'est peu soucié jusqu'ici.

Nous espérons donc que le but que nous poursuivons sera atteint pour le plus grand profit matériel et moral de notre région, qu'au lieu de nous déchirer en luttes intestines, nous nous appliquerons à défendre le produit de notre sol commun, à déjouer, par là, l'âpre concurrence qui le menace. Nos deux syndicats au besoin pourraient n'en former qu'un dont l'action serait surtout dirigée en vue de faire valoir à son vrai prix le vin de Barsac, à maintenir sa haute réputation. 

Dans l'espérance, Monsieur le Président, que notre sage requête sera favorablement accueillie par le Syndicat de Barsac dont l'appui ne nous fera pas défaut,

 Veuillez agréer, Monsieur le Président, nos salutations empressées. 

J. LACOSTE.    
Président du Syndicat Viticole de Pujols sur  Ciron.  

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CONSIDÉRATIONS

 sur l'adjonction de Pujols sur Ciron à l'appellation Barsac

 

Si quelques représentants du Syndicat Viticole de Pujols sur Ciron se trouvent parmi vous aujourd'hui, sur votre déférente invitation au sein du  Syndicat Viticole de Barsac (dont j'ai été membre fondateur vers 1920), je le proclame tout de suite nous n'y sommes que pour défendre l'appellation « Barsac ». 

L'action constante du Syndicat Viticole de Pujols sur Ciron a été, tout en demandant pour le produit de ses vignes un classement équitable et vrai, de créer une région « Barsac » qui ait comme la nature l'en a heureusement dotée, des limites exactes, bien définies et qui donne un produit pourvu des mêmes qualités substantielles, et dont il faut maintenir par une incessante propagande la vieille et haute réputation.

Nous voulons aux caprices de l'esprit individualiste négateur de tout progrès, aux compétitions d'intérêts particuliers substituer la solidarité agissante d'intérêts communs. Nous voulons l'ordre dans les délimitations, la justice, étroitement unis avec l'intérêt général. 

Nous voulons faire et nous vous demandons de faire de cette aire de production identique située sur nos deux communes un ensemble cohérent et logique.

 Peut-on craindre si on y ajoute la partie de Pujols sur Ciron que cette aire de production soit exagérément étendue, qu'elle donne sous cette marque trop de vin pour les besoins du Commerce ? 

Nous ne le croyons pas. Le danger se trouverait plutôt dans l'insuffisance du produit qui risque de manquer si on fait la réclame indispensable au lieu de s'endormir sur ses lauriers conquis et de voir au réveil la place prise par d'autres plus avisés.

Cette région « Barsac » ne serait pas trop étendue, loin de là, la plupart des marques de vins les plus célèbres le sont beaucoup plus que ne seraient Barsac et Pujols sur Ciron réunis sous la même dénomination. Est-ce que la marque « Sauternes » ne comprend pas plusieurs communes dont le vin, s'est vendu sans difficultés jusqu'à ce jour ? 

Il se vendrait encore mieux si certains débouchés n'étaient pas fermés par une politique de régime sec de quelques pays d'exportation.

Pourquoi la marque « Barsac » dont vous êtes fiers avec juste raison ne serait-elle pas représentée par une surface de culture plus adéquate à la nature même de son vin ? 

Je cite un autre exemple, la marque « Saint‑Emilion » comprend également plusieurs localités ; mais la surface seule de cette commune est bien plus étendue que l'ensemble de Barsac et Pujols sur Ciron.

 Pour 1928, superficie plantée en vignes 1619 hectares, récolte 63.383 hectolitres. Tandis que pour la même année Barsac et Pujols sur Ciron réunis n'ont que 794 hectares (Barsac 644 hectares, Pujols sur Ciron 150 hectares 26) récolte pour les deux communes 10.889 hectolitres, 76 (Barsac 10.003 hectolitres, Pujols sur Ciron 896 hectolitres, 76), c'est-à-dire deux fois plus de surface et six fois plus de produit.

 Saint Emilion écoule bien cependant son vin; on ne peut donc craindre qu'il n'en serait pas de même du groupe Barsac / Pujols sur Ciron. C'est une simple question de propagande que nos deux syndicats devraient entreprendre.

 A l'appui de ce que nous venons d'exposer, écoutez l'opinion de M. Larronde, conseiller du Commerce extérieur, exprimée dans un article déjà loin, mars 1906, dans la « France du Sud‑Ouest:

 « De regrettables erreurs ont été commises et il en résulterait que certaines marques sont appelées à disparaître de la mémoire du consommateur, par exemple la marque « Saint Julien » que de nombreuses et importantes maisons de notre place ont cessé d'offrir, l'exiguïté de la production leur enlevant l'intérêt qu'elles pouvaient avoir à porter sur cette marque les effets de leur propagande. Que l'on ne se fasse pas d'illusion, il faut très peu de temps pour qu'une marque s'effondre dans l'indifférence et dans l'oubli, nous pourrions en citer sans remonter bien loin de frappants exemples. »

 Et dans un autre article d'une date plus récente, novembre 1923, il écrivait dans le même, journal :

 " Est-il raisonnable qu'un exportateur qui recevra, de l'autre bout du monde, la commande d'un vin d'une commune célèbre mais générique soit obligé de répondre « je n'en ai pas », quand il aura dans sa cave un vin de la commune voisine tellement pareil, possédant à tel point les mêmes qualités substantielles, qu'un expert bordelais serait dans l'impossibilité de distinguer l'un de l'autre. "

 Ce n'est pas une pareille chinoiserie qu'à voulu le législateur, et quand on voit dans certaines communes qui ne sont pas encore délimitées, des appétits se faire jour, des combinaisons s'ébaucher dans le but de restreindre dans les limites étroites à des fins égoïstes le tracé d'une région, on est forcé de reconnaître que ceux qui se livrent à ces manœuvres n'agissent pas en bons Français.

 Et encore un extrait d'une chronique de Jean Pierre parue clans la « Petite Gironde » du 7 juin 1925.

 "On m'a reproché maintes fois de n'avoir pas dit mon sentiment sur ces questions de délimitations. J'ai dit que la loi était mal faite et qu'inéluctablement il faudrait la refondre. De plus j'ai été fâcheusement impressionné plus que je ne saurais le dire par le spectacle de frères ennemis, qui s'entre-dévorent. L'égoisme de certains Syndicats m'est pénible et aussi leur maladresse qui leur fait éliminer certaines communes où on fait de beaux vins dignes de soutenir la réputation d'un grand nom, alors qu'ils acceptent d'autres communes où les hybrides font florès. "  
J'aurais voulu plus de méthode dans cette question de délimitations. J'aurais voulu que ceux qui sont chargés d'éclairer les juges, de les documenter, prennent l'expression  usages locaux, loyaux et constants dans un sens précis et intégral. On aurait évité des décisions regrettables qui font ou ont fait jurisprudence. Fort heureusement la jurisprudence évolue comme toutes choses. En ces questions son évolution n'est pas terminée, car le bon sens finit toujours par avoir raison. Et à ce sujet j'aurais voulu que des hommes de métier, des Girondins, superposent la carte vinicole de la Gironde à la carte géologique. On aurait trouvé là d'utiles indications car j'ai toujours cru que le terrain était un facteur de la qualité du vin. »

  Ces opinions autorisées donnent raison à nos vues et à notre action, car nous n'avons jamais considéré autre chose pour le classement de Pujols sur Ciron, que la démonstration faite par la superposition de l'aire de production sur le plateau calcaire situé sur nos deux communes. Cette aire de production de même nature ne peut donner que des vins identiques, car si les encépagements peuvent se transporter n'importe où, le terrain et le climat restent immuables.

  Pujols sur Ciron a été classé illogiquement dans les "Graves" parce que la configuration d'une région adéquate à la nature de son sol et de ses vins n'a pas été le but de ceux qui ont tracé cette délimitation. La justice eût été de faire dans le temps présent des groupements fondés sur la nature du sol, garantie de la qualité du vin, c'était là l'esprit même de la loi, comme c'était la raison et le bon sens. Mais il y a eu, contre, ce principe d'équité et de vérité, coalition d'intérêts particuliers qui ont éliminé certains terrains d'appellation où ils devraient être normalement placés.  

La loi de 1919, incomplète, mal étudiée, favorisait le désordre dans les appellations, le créait par l'application des usages dans les limites géographiques d'une commune ou de plusieurs communes.  

La loi de 1927 corrigeant la première n'est point encore parfaite puisqu'elle consacre encore les usages.

A notre avis en ce qui concerne le « Sauternais » l'aire de production suffit pour garantir la délimitation pour le groupe des terres argilo-calcaires de Barsac et de Pujols sur Ciron, il n'y a même pas matière à discussion car il forme un bloc parfaitement délimité.

  J'arrive à un point très délicat, Barsac a des terrains plantés en vignes blanches que la loi de 1927 rejette. 

De même qu'au questionnaire du Gouvernement belge demandant si dans les communes à l'appellation tous les terrains étaient propres au vin de l'appellation, le Comice agricole du canton de Podensac dans sa réunion de septembre 1927 a répondu franchement par la négative, nous dirons de même puisqu'il faut y venir, que dans les marais et palus du Sauternais, la culture de la vigne à grand rendement ne peut donner qu'un vin indigne de l'appellation. 

Ce que nous défendons c'est, la qualité du vin et si jamais jusqu'à ce jour nous, n'avons parlé des palus de Barsac, c'est que dans la revendication de Pujols sur Ciron nous n'avons pas voulu froisser certaines susceptibilités, heurter certains intérêts. Il faut pourtant le dire et je suis bien placé pour le faire, ayant moi-même des propriétés dans ces terrains.

Pour la renommée du vin de Barsac, il faut écarter de la marque les vins qui la déprécient, portent atteinte à son renom, sa qualité et par là prêtent aisément à la concurrence.  

Le vin réputé produisant peu à l'hectare, il faut maintenir sa qualité pour justifier les prix rémunérateurs en rapport avec sa qualité, l'intérêt et le simple bon sens le commandent; ailleurs il n'y a que péril. Notre devoir est de faire connaître de plus en plus dans les milieux susceptibles de le payer à son prix par une active propagande, mais il faut assez de vin de qualité, pour que le commerce nous y aide, c'est pourquoi si on élimine les palus comme le veut la loi de 1927, l'intérêt de la marque « Barsac » demande d'y englober les terres de même nature qui prolongent les vôtres sans discontinuité, où se fait un vin frère jumeau du vôtre.  

Votre marque, permettez-moi l'expression, est beaucoup galvaudée, le vin de grandes parties de palus complantées en vignes blanches va dans des chais de communes de « Graves », à Cérons, à Illats. Quelles quantités sont déclarées en moyenne par les propriétaires de ces chais ? 

Si le vin de palus ne paraissait je suppose que sous le nom de « Bordeaux » et non sous celui de « Barsac » de combien serait diminuée la quantité ayant actuellement droit à l'appellation « Barsac », c'est à savoir ?  

Mais nous ne serions pas surpris qu'elle fût de beaucoup supérieure à la quantité de vin blanc récoltée sur Pujols sur Ciron.

  Alors qu'est-ce que nous vous proposons de faire ? 

Un territoire avec l'appellation « Barsac » qui soit l'expression exacte de la vérité. A vous d'améliorer, d'enrichir cette marque, en faisant une unité de cette aire, de production de terres argilo-calcaires qui n'est vraiment pas si étendue, qui ne peut s'étendre davantage parce qu'elle est étroitement délimitée par la nature.

  Je termine. Il faut être de son temps. Vous y parviendrez en vous débarrassant de préjugés encombrants, en évitant de compromettre l'avenir.  

Savoir et comprendre qu'à des besoins actuels il faut des vues nouvelles. Il faut surtout avoir un esprit ouvert qui sache sans hésiter faire abstraction d'un passé désuet.  

Je crois dans ce simple exposé, reflet de ce que nous voyons et pensons à Pujols sur Ciron, être resté dans la vérité qui est la garantie d'une grande marque et la sauvegarde d'intérêts légitimes qui nous sont chers, et que vous aurez à coeur de défendre avec nous au nom de l'équité.

 

J. LACOSTE.  
Président du syndicat Viticole de Pujols sur Ciron.

 

Ce travail n'a pu être lu le 24 mars 1929 à une réunion du Syndicat Viticole de Barsac, à cause d'un ordre du jour très chargé.  

Ce jour là les terrains des palus, par un vote catégorique, ont été rejetés de l'appellation Barsac.

De ce fait une quantité considérable de vin de Barsac est enlevée au commerce, beaucoup plus que Pujols sur Ciron ne produit de vin. La raison et l'équité demandent d'adjoindre aux terres de l'appellation Barsac, dans l'intérêt de cette marque, celles de même nature de la commune voisine qui les prolongent sans discontinuité.

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Lettre de l'Abbé    BELLIARD. Curé de Pujols sur Ciron.

Pujols sur Ciron, le 26 juillet 1925. 

Veuillez me permettre de vous présenter une requête, et de plaider devant vous là cause des propriétaires de Pujols sur Ciron.

Je n'ai pour ce faire, aucun titre officiel, je n'ai, non plus, aucun intérêt personnel. Mais cette cause me parait juste, et présente pour mes paroissiens un réel intérêt. C'est pourquoi je me permets de faire appel à votre bienveillance.

Les propriétaires Pujolais reconnaissent et déclarent que, aux termes de la loi du 6 mai 1919, interprétée par les jugements rendus contre eux, ils n'ont pas le droit d'employer les appellations «Barsac» ou «Sauternes».

Ils demandent aux Syndicats en cause, et, en particulier, au Syndicat Barsacais, de bien vouloir leur permettre de vendre leur vin sous le nom de « Barsac ».

Cette autorisation ne vaudrait que pour les vins présentant les caractères substantiels du Barsac et produits par des vignes répondant aux conditions précisées dans l'enquête de l'U.G. (Lettre du 18 mai 1925, de M. de Roquette Buisson).

a) Vignes ne comprenant que des cépages admis: Sémillon, Sauvignon, Muscadelle,

b) plantées dans le sol argilo-calcaire du plateau de Barsac

c) et pour lesquelles sont employées les méthodes Barsacaises de récolte et de vinification.

Cette concession ne porterait pas à Barsac un préjudice considérable. Les vignes ouvrant le droit au bénéfice, et défalcation faite de celles qui en jouissent déjà, ne couvrent guère que 120 hectares.

Il y a déjà, en effet, des vignes Pujolaises qui produisent du Barsac : elles appartiennent à des Barsacais, au nombre de 44, et elles couvrent une superficie de 28 hectares, soit plus de 1/10ème de la surface Pujolaise plantée en vignes. De ces 44 Barsacais, un seul, à notre connaissance, traite et vend à part le vin récolté dans Pujols.

Pujols compte encore près de 10 hectares plantés en vignes et appartenant à des Preignacais ou à des Bommais. Les vins blancs récoltés dans ces vignes sont déjà, évidemment, des Sauternes.

Enfin, quelques Pujolais possèdent des vignes dans Pujols et dans le Sauternais : nul ne peut nier qu'ils ne soient exposés à la tentation, vu la différence des prix du Pujols et du Sauternes.

La concession faite à Pujols ne créerait pas un précédent dont puisse s'autoriser quelque autre commune, car, géologiquement et géographiquement, Pujols forme avec Barsac un tout nettement délimité:

a) Le stampien qui forme le plateau dit: Haut Barsac traverse Pujols du nord au sud, sur une largeur presque égale à celle de la commune, et finit presque aussitôt après;

b) Il n'y a nulle part, entre Barsac et Pujols de frontière naturelle : une simple allée charretière et des alignements fixés par mesure administrative.

c) Les autres frontières de Pujols sont déterminées par des accidents du sol ou des gisements qu'il est impossible de modifier : du côté d'Illats et de Landiras, c'est une bande de sable, d'un kilomètre de largeur moyenne, ou ne poussent guère que des acacias et des pins ; vers Budos, la vallée marécageuse du Tursan ; vers Bommes et Preignac, les alluvions sablonneuses du Ciron. Noter enfin que tous les efforts des Pujolais dans la lutte contre les gelées printanières et les orages à grêle servent la cause des Barsacais.

A ce plaidoyer pro domo, où nous nous sommes efforcé de rester dans l'esprit qui a inspiré l'enquête de l'U.G. (mai 1925) et les voeux récents de la Chambre de Commerce de Reims, on nous permettra d'ajouter quelques extraits d'études émanant de personnalités autorisées. 

« Quand il fut question de délimiter les régions pouvant prétendre à une appellation d'origine, j'ai montré que la délimitation devait forcément s'appliquer à une aire géographique. 

« La loi du 6 mai 1919.... a eu pour objet, en premier lieu, d'écarter des régions réputées les vins des vignobles à gros rendement. et surtout les vins exotiques.....

« Mais ce serait une faute d'encourager les contestations entre propriétaires récoltant, dans des communes rapprochées, des vins d'une qualité à peu près similaire, sous prétexte que le nom de telle commune est plus connu du consommateur que, le nom de tel autre., ... Il faut donc procéder avec beaucoup de prudence, lorsqu'il s'agit de restreindre à un territoire strictement limité une appellation recherchée, en demandant au temps d'aider à aplanir les difficultés entre récoltants.

« A ce point de vue, l'article 11, introduit dans la loi au cours de la discussion, fut une erreur fort regrettable.... Il convient de se montrer plutôt libéral dans les délimitations des sous régions, en laissant aux Syndicats viticoles le soin de ramener à des pratiques rationnelles les viticulteurs qui veulent bénéficier de noms réputés. »

           Octave AUDIBERT, (Union Girondine, 1 juin 1924)

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« On m'a reproché maintes fois de n'avoir pas dit mon sentiment sur ces questions de délimitation ….J'ai dit que la loi était mal faite et qu'inéluctablement il faudrait la refondre.... J'aurais voulu que des hommes du métier, des Girondins, superposent la carte vinicole de la Gironde à la carte géologique. On aurait trouvé là d'utiles indications, car j'ai toujours cru que le terrain était un des facteurs de la qualité des vins. »

Chronique agricole de Jean Pierre, Petite Gironde du 7 juin 1925.

 

« Après de longues et laborieuses controverses, les textes furent élaborés et la loi (du 6 mai 1919) fut votée. Il restait à l'appliquer et à délimiter des zones englobant toutes les localités qui, produisant des vins ayant les mêmes qualités substantielles, pouvaient avoir droit à une même appellation.

Le besoin de simplification qui, dans le commerce, s'impose souverainement, a depuis longtemps réduit à un petit nombre le noms des communes appelés à figurer sur les prix courants. Ces communes sont en quelque sorte les représentantes de celles qui les entourent ......

Est il raisonnable qu'un exportateur qui recevra de l'autre bout du monde la commande d'un vin d'une commune célèbre, mais générique, soit obligé de répondre « je n'en ai pas », quand il aura dans ses caves un vin de la commune voisine, tellement  pareil, possédant à un tel point les mêmes « qualités substantielles », qu'un expert bordelais serait dans I'impossibilité de distinguer l'un de l'autre ?

Ce n'est pas une pareille chinoiserie qu'a voulu le législateur....

Tous ceux qui, de près ou de loin, peuvent avoir à intervenir dans ces controverses doivent s'abstraire de leur intérêt personnel… pour s'élever à des considérations plus générales, et ne pas perdre de vue les besoins de l'exportation, qui se rattachent étroitement à l'intérêt économique de la France.....

Il appartient aux communes qui bénéficie d'un nom célèbre... de se montrer larges et conciliantes quand il s'agit de délimiter la région admise a se servir de leur nom. Elles y ont intérêt, car, pour faire une grande marque, la quantité est nécessaire autant que la qualité. »

M. Larronde, Conseiller du commerce extérieur (« La France » du 27 novembre 1923)

 

Les propriétaires de Pujols font appel à ces sentiments de conciliation et à la générosité de tous les membres des Syndicats intéressés; ils leur demandent de ne point s'opposer à la révision, en notre faveur, de la loi du 6 mai 1919, et de vouloir bien, sans attendre cette révision. qui peut tarder encore, nous accorder spontanément, d'un geste large et facile, un bénéfice qui a pour nous une grosse importance, et dont les donateurs n'auront pas à supporter les frais.

 

A. BELLIARD.

Curé de Pujols sur Ciron.

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Carte géologique. Carte topographique 
basée sur le cadastre.
PujoCartegeologique.jpg (73236 octets) PujoCarteCadastre.jpg (115724 octets)
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Réalisée le 20 juillet  2002  André Cochet
Mise ur le Web le    août   2002

Christian Flages

Mise à jour le 

                 

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