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La
GARONNE André
REBSOMEN FERET
et fils éditeurs |
Passage concernant: St
MICHEL |
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Suivant
son parcours, le Ciron passe au sud du bourg de Saint Michel de Castelnau.
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L'église de ce modeste village, récemment reconstruite, ne conserve de l'ancien édifice que le bas du clocher et la porte d’entrée du XIVe siècle. Les anciens usages s'y sont maintenus et les métayères déposent encore sur l'autel les oeufs qu’elles veulent faire couver afin que les poulets soient bien conformés.
Les mères de famille placent également sur l'autel de la Sainte Vierge, les chemises, les bonnets ou les robes des enfants qu'elles consacrent à Marie. Il y a peu d'années chacun venait aux offices tenant à la main un petit cierge de cire qu'il fabriquait et qu'il allumait dans l'église; les fumées de ces lumignons emplissaient l'atmosphère et noircissaient la voûte.
Enfin,
en mai et en octobre, de nombreux pèlerins accourent de fort loin en pèlerinage
à Saint Michel de Castelnau pour y fêter le céleste archange.
Bientôt les rives du Ciron s'élargissant, le ruisseau se transforme en un étang charmant aux rives boisées de pins et de chênes. La végétation y est touffue comme celle des forêts vierges; au milieu des verdures et des arbres de belle venue, de vénérables troncs à demi effrités s'inclinent sous le poids des ans, du lierre et de la mousse.
Au
bord du rivage, les plantes aquatiques verdissent les sombres eaux de ce
gracieux petit lac dont le calme et le silence n'est troublé que par le cri de
la poule d'eau ou des bécassines.
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Mais
les eaux ne tardent pas à reprendre leur cours normal et avant de redevenir
rivière, l'homme a su les capter pour les nécessités de son industrie. Une
papeterie aux machines puissantes broye la paille de seigle si abondante dans la
contrée, pour en faire un papier roux mince ou épais,
Qui des magasins aux offices,
Parmi
les cornets pleins d'épices
Sert
à transporter sans à-coups
Et
les gigots et les saucisses.
(Le
Ciron, poésie de M. l'abbé Ferrand.)
Une
cascade à la chute majestueuse qui brise la masse des eaux du Ciron, un peu après
un vieux moulin, l'arcade d'un pont en ruines que les lianes enserrent, achèvent
délicieusement ce petit coin de la lande Bazadaise.
Un
mince affluent du Ciron sur sa rive droite, le Gua sec, nous fait découvrir à
quelques cents mètres de là, bien protégé par une superbe avenue d’ormeaux
séculaires, le chàteau de Castelnau de Mesmes habité par M. Edmond Lamothe de
Mondion.
Du château primitif, il reste fort peu de chose, et les restaurations ou additions faites au XVIIe siècle ont été encore considérablement altérées au XIXe siècle.
On
avait, en 1820, transformé cet édifice en forge et l’une des vieilles tours
de défense, appelée la Tour d’Epernon, aux murs épais, consolidés par des
cercles de fer était devenue un haut fourneau. Un traitement aussi violent
devait amener sa ruine et il n'en demeure plus trace.
Aujourd’hui,
des agréments modernes qui gênent un peu l’archéologue, on dégage
facilement la masse principale du château, grand équerre flanqué, à chacun
des angles nord-est, nord-ouest et sud-ouest d'une tour ronde, l’une arrivant
au niveau du toit, l’autre en reconstruction sur remplacement de l’ancienne,
écroulée en 1907, et la troisième à machicoulis et crénelée, contenant la
chapelle seigneuriale.
Au
centre de l’équerre s'élève une sorte de tour rectangulaire percée au rez-de-chaussée
d'une porte ornée d'un fronton brisé et d'un médaillon.
La toiture de cette tour est élevée et aiguë, tout comme celle du bâtiment principal. De grandes fenêtres à croisées, quelques unes ayant deux traverses superposées et terminées en haut par deux petits arcs en plein cintre, sont les seuls détails caractéristiques de cette architecture.
Un jardin anglais recouvre les anciennes basses-cours du château et le fossé nord-ouest, à demi comblé, rappelle celui qui entourait jadis la forteresse.
Enfin, de vertes
prairies limitées par de beaux bouquets d'arbres complètent du côté nord-est
cette agréable résidence.
Certes
l'histoire du château de Castelnau-de-Mesmes a été mieux conservée que le château
lui-même, et les archives anciennes nous rappellent qu'un de ses premiers
seigneurs, en 1242, était convoqué par Henri III d'Angleterre, et qu'en 1294,
Edouard 1er écrivait à Bertrand de Mesmes, seigneur de la terre de
Castelnau.
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Cette même terre appartenait, dès 1421, à la famille de la Motte, dont les principaux représentants furent Jean de la Motte, chevalier d’honneur de la Reine, mort en 1500, et François 1er de la Motte, premier baron du Bazadais, mort vers 1569.
Ce dernier personnage avait épousé Marie de Ballanguier. Comme il ne pouvait payer ses dettes, un de ses créanciers, Gaston de Béarn, seigneur de Bonnegarde, arriva devant le château de Castelnau et en défonça les portes malgré la résistance de ses défenseurs.
Ce
n'était que le premier des sièges que cette forteresse allait supporter.
En
1574, la garnison protestante de Casteljaloux, comrnandée par Théodore
Agrippa d’Aubigné, le célèbre historien, était venue du côté de
Castelnau, et selon le récit qu'en fait ce dernier, avait pris le château «
par escalade ou par intelligence ». François 1er
de la Motte était mort depuis 1569 et sa veuve, Marie de Ballanguier, était
maîtresse de ses biens. Elle usa de l'influence qu'elle avait sur le marquis de
Lavardin et fit désavouer cette affaire par Henri, roi de Navarre qui renonça
à sa prise.
Mais
les vainqueurs ne voulaient pas lâcher leur conquête. Alors on se servit pour
les faire partir d'une ruse qui se retourna contre ses auteurs.
Le
capitaine La Salle du Ciron, catholique, accepta de mener l'affaire. Il
s’entendit avec deux soldats de la garnison qui consentaient à lui ouvrir les
portes du château quand sa troupe et lui se présenteraient. On devait choisir
le moment où d'Aubigné serait sorti pour quelque expédition avec le gros de
son régiment
Les deux soldats, par crainte ou par franchise, racontèrent la chose à leur capitaine D'Aubigné feignit une sortie, mais au milieu de la nuit rentra dans la place. Le lendemain matin, une bande de soldats de La Salle se présenta à la porte d’entrée, vêtus, les uns en paysans, les autres en femmes.
Ils
furent introduits dans la cour et se croyaient déjà sûrs du succès, quand
soudain des détonations retentissent de tous côtés, les balles sifflent et
quarante huit de ces malheureux tombent mortellement frappés après une lutte
inutile.
Pendant
ce temps La Salle s'avançait suivi de 80 « salades » ou chevau-légers; un
des siens, échappé au carnage, fut le prévenir à temps et La Salle tourna
bride, poursuivi par cinquante cavaliers huguenots qui le pourchassèrent
pendant quelque temps.
Marie de Balanguier voyait ses projets s'écrouler encore une fois, elle se tourna alors vers l’amiral Honorat de Savoie, marquis de Villars, qui s'était déjà distingué dans plusieurs affaires contre les réformés.
Villars accepta de venir occuper Castelnau à condition qu'il n'aurait pas à combattre pour y entrer. Il emmenait avec lui quatorze pièces de canon qu'il traînait à travers les sables de la lande.
Mais
à son arrivée, Villars aperçoit une grosse troupe de cavalerie, et un corps
d'arquebusiers qui stationnaient en ce lieu avant de se rendre à Casteljaloux.
Villars crut qu'on avait manqué à la parole donnée, et laissant Castelnau, se
dirigea d'un autre côté.
Quelques
années plus tard, en 1592, le château de Castelnau fut de nouveau assiégé et
pillé par le maréchal de Matignon.
Ce
n'est pas encore tout: les frondeurs après les huguenots s'acharnent autour de
cette place et la ravagent en 1652.
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A cette époque, les sieurs Marchin et Balthazar, généraux de l'armée du prince de Condé, bombardent ses murs avec deux pièces de canon pendant deux jours, obligeant sa garnison à capituler.
Les
appartements furent mis au pillage, des charrettes pendant plusieurs jours
emportèrent le mobilier. Les sieurs de Saint Michaud et de Barbuscan y demeurèrent
avec leurs soldats pendant six mois au nom du prince de Conti.
A
ce moment Castelnau était un marquisat et appartenait à la célèbre Guyonne
de la Motte, fille de François II de la Motte, maréchal de camp des armées du
Roi, mort en 1624.
Guyonne
s'était mariée cinq fois, d’abord avec Jean de Gourdon, marquis de Vaillac,
puis, en 1652, avec le marquis de Villefranche; après lui elle avait épousé
le sieur de Brue, président , du Parlement de Bordeaux, et enfin s’était
donnée à Jean d’Espagnet, président à mortier du même Parlement.
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En
1698, nous trouvons Castelnau aux mains de messire Gaston de Bouzet, marquis de
Poudenas, et enfin, à la veille de la Révolution, devenu la propriété de
messire Jean de Brethon, marquis de Castelnau, premier baron du Bazadais.
Si nous remontions le cours du Gua Sec pendant quelque temps et que nous inclinions vers la gauche, nous pourrions arriver, au milieu des pignadas, à une petite source limpide et ensuite à une motte de sable recouverte de débris de briques et de pierre.
C'est
là que s'élevait la chapelle de la Magdeleine, dont l'ancien bénitier sert
maintenant de borne au département à quelques cents mètres de là. à
Bourdassay, non loin du lieu appelé les Trois Chênes, la station de Tres
Arbores de l'ancien itinéraire de Bordeaux à Jérusalem.
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Réalisée le 10 janvier 2002 | André Cochet |
Mise sur le Web janvier 2002 |
Christian Flages |