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La
GARONNE André
REBSOMEN FERET
et fils éditeurs |
Passage concernant: UZESTE |
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Uzeste,
dans l'étude que nous faisons du Bazadais est le centre et le foyer d'où
rayonna, au XIVe siècle, la puissance seigneuriale et ecclésiastique qui
transforma cette contrée, édifia des châteaux et des forteresses que les
guerres et les siècles n'ont pu détruire, et fit la gloire et la renommée de
ce coin de Guyenne.
Un homme, un seigneur, un archevêque de Bordeaux devint le promoteur de ce mouvement: Bertrand de Goth.
Sa famille connue dans le pays par ses droits et ses titres avait déjà donné à l'Eglise un évêque de Bazas, un évêque d’Agen, un cardinal archevêque de Lyon.
Que pouvait-il rester en fait d’honneur et de prestige à cette illustre lignée ?
Le suprême pontificat peut-être? C'est en effet cette éminente dignité qui fut conférée à Bertrand de Goth, en 1305.
Le
nouveau pape Clément V est trop connu pour que nous cherchions même à
retracer l'histoire de son pontificat : le transfert du siège apostolique à
Avignon, cause du grand schisme d'Occident, la réunion du XVe Concile oecuménique
de Vienne et la destruction de l'ordre des Templiers en marquent les étapes
saillantes.
Et
c'est après une existence glorieusement remplie que, sentant ses forces
s'affaiblir malgré son âge peu avancé, il voulut respirer l'air de son pays
natal, espérant y trouver une nouvelle vitalité. Il partit pour Uzeste, mais
la maladie le terrassa sur les bords du Rhône et il mourut à Roquemaure, en
1313, âgé de cinquante ans. Suivant son désir, son corps fut ramené à
Uzeste pour y être enseveli dans l'église Notre-Dame.
Nous
sommes heureux de reproduire ici le portrait de Clément V, peint vers 1350 sur
les murs de la célèbre chapelle des Espagnols, dans le cloître de l'église
Santa Maria Novella, à Florence. Cette oeuvre, attribuée aujourd'hui à Andrea
da Firenze, forme un
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des sujets d'une vaste composition figurant le Triomphe de l’Eglise.
Le
pape incarne la loi canonique, à gauche, Justinien personnifie la loi civile et
à droite, Pierre Lombard, la Théologie pratique. Ce portrait est celui qui par
son ancienneté offre les plus grandes garanties de ressemblance.
L'église
d'Uzeste avait déjà eu les prédilections marquées du Pontife. En 1312, il
avait constitue et richement doté un chapitre, ainsi d'ailleurs qu'à
Villandraut. Ces deux fondations furent rattachées à l'archevêque de Bordeaux
et mises en jouissance d'abondants privilèges.
Ce
n'est pas tout encore. Clément V avait voulu, en souvenir de ses jeunes années,
transformer l’église romane qui abritait une statue vénérée de la Vierge,
encore conservée, l'embellir, et en faire le sanctuaire élégant du XIVe siècle
que nous contemplons aujourd'hui.
Telle
qu'elle est, l'église d'Uzeste se présente avec trois parties distinctes se
rattachant à trois périodes différentes : ses nefs, son chevet et son
clocher.
La
masse extérieure de ses nefs appartient à la période romane: elle forme une
construction lourde et peu attrayante soutenue par des contreforts, percée de
fenêtres étroites et allongées, en forme de meurtrières, et de deux portes
latérales.
A son chevet du XIVe siècle, trois absidioles rayonnantes, éclairées par des fenêtres à meneaux de style flamboyant, sont surmontées du mur du rond-point du choeur enchâssé de fenêtres semblables et formant extérieurement comme une tour hexagonale couronnée d’une balustrade à arcatures trilobées.
L'équilibre
de l'ensemble est maintenu par des arcs-boutants d'un style simple mais élégant
et soigné.
Dominant cet ensemble, se dresse le clocher, haut de 52 mètres, édifié au XVe siècle solidement maintenu aux angles par de solides contreforts en retrait, agrémentés de pinacles, orné de fenêtres flamboyantes et aux deux étages d'une balustrade de même style.
Le
tout s'achève en une flèche octogonale ajourée de petites ouvertures multilobées
qui paraît un peu grêle par rapport à sa base.
Tel est l'aspect général extérieur de l'église. Complétons cette vue d'ensemble en mentionnant quelques détails qui nous ont échappé.
C'est d'abord, au-dessus de la porte sud, un tympan, hélas! mutilé, mais dont les lignes révèlent une exquise sculpture figurant le couronnement de la Vierge.
Le Christ et sa mère sont assis sur le même siège, des anges les entourent. Nous avons déjà rencontré ce motif au tympan sud de la cathédrale de Bazas. Mais ici, l’attitude de la Vierge, que l'on devine facilement malgré les mutilations, est plus réservée et plus modeste, et le léger recul en arrière traduit à lui seul ces sentiments d'humilité confuse dont le sculpteur a voulu imprégner son travail.
Et comme pour arriver à vaincre cette timidité exquise, le Christ étend le bras droit avec une certaine autorité douce et persuasive. Les anges de côté, surtout celui de gauche, contemplent la scène dans une sorte d'abandon du corps, comme s'ils étaient distraits plutôt qu'impressionnés par ce spectacle.
Au
dessous un linteau sculpté, mais presque incompréhensible, peut représenter
l'obole de la veuve et le figuier stérile.
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Nous
ne laisserons pas cette description extérieure sans mentionner le petit
escalier enveloppé d'une tourelle octogonale finissant en pyramide et dont les
marches se continuent sur la butée de l'arcboutant voisin. Terminons en
indiquant la rosace qui étale
ses jolis rayons sur la façade occidentale.
Pénétrons maintenant dans l'intérieur de l'église. Ce qui frappe le regard de suite, ce sont les douze piliers qui soutiennent la voûte à nervures saillantes de la grande nef: six d'entre eux, à l'apparence robuste, sont formés de huit colonnettes engagées, six autres n'ont que quatre colonnes et impressionnent par leur aspect fluet et léger, que les premiers font encore mieux ressortir.
En
nous avançant vers le sanctuaire, nous nous rendons compte de la particularité
de l'abside dont les trois chapelles et le déambulatoire ne font pour ainsi
dire qu'un. En effet, des voûtes sexpartites, inscrites dans un hexagone,
couvrent à la fois chapelles et déambulatoires et retombent sur quatre piliers
formés de six colonnettes placés en demi-cercle et entourant le choeur.
C'est
au centre de ce demi-cercle, dans l'axe de la nef que se trouve aujourd'hui le
tombeau de Clément V le joyau de cette église.
Jadis
ce monument fut « dressé de jaspe, d'albâtre et de marbre blanc richement élabouré
». C'était l'oeuvre d'un artiste d’Orléans, Jehan de Bonneval, commandée
par un neveu du pontife défunt, Bertrand de Goth, vicomte de Lomagne, et que
devait faire achever le cardinal Gaillard de la Motte, en 1359.
Ce travail d'art fort remarquable et cette tombe illustre allait, en 1572, être odieusement mutilée et profanée par les huguenots; les ossements du pape furent jetés dans les flammes.
Leur
fureur ne put cependant tout détruire. Il y a quelques années, une
restauration fort heureuse a permis de rapprocher ensemble bien des fragments épars
et le monument est à peu près complet, quoique privé de ses sculptures, de
son jaspe et de son albâtre.
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Au-dessus du soubassement du coffre et de la table supérieure du tombeau qui sont de marbre noir repose la statue couchée de Clément V en marbre blanc.
Sa tête, affreusement mutilée, s'appuie sur un coussin dans lequel elle s'enfonçait autrefois, coiffée de la tiare.
Ses
deux mains se croisent pieusement
sur sa poitrine. On observera les fines sculptures du col de l'amict, du bas de
l'aube, du manipule et de la chaussure. Tout autour de la dalle supérieure,
taillée en biseau, court une inscription aux lettres gravées en creux et dorées
qui constitue l'épithaphe de cette tombe célèbre.
Dans
le déambulatoire, on remarque un autre sarcophage. Sur la dalle funéraire est
figuré un chevalier couché dont on distingue les détails de l'armure, l'épée
et le bouclier chargé d'un écusson aux armes de la famille de Grailly.
Près de l'église, une fontaine, dite du pape, est surmontée d'un écusson de pierre aux armes de Clément V. Non loin de là, de vieilles maisons ont conservé leurs fenêtres à meneaux du XVe siècle.
Réalisée le 10 janvier 2002 | André Cochet |
Mise sur le Web janvier 2002 |
Christian Flages |