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Fernand Meyer | 27 juillet 2006 | ||||
Le Républicain 27 juillet 2006. TÉMOIGNAGE / Fernand Meyer, de Lucmau, renoue avec son village d'origine. L'émouvante histoire de l'exode. Ce week‑end, le village lot‑et‑garonnais de Cocumont vibrera au rythme des cérémonies du jumelage avec le village alsacien de Dessenheim. Fernand Meyer, aujourd'hui installé à Lucmau, fera le déplacement. Il confie ses souvenirs de l'exode. Ils ne sont désormais plus nombreux à avoir réellement vécu l'exode de 1939. Pourtant, les habitants de la commune alsacienne de Dessenheim (Haut‑Rhin) seront nombreux à participer aux festivités du jumelage prévues à Cocumont les 29, 30 et 31 juillet. Tous les trois ans, depuis 1991, les communes jumelles se retrouvent alternativement dans le Nord-Est ou dans le Sud‑Ouest pour se souvenir. Mais bizarrement, c'est à Lucmau, au coeur de la lande girondine, que se trouve la mémoire vivante de cette tragique aventure humaine. Emotions A 82 ans, Fernand Meyer, Dessenheimois d'origine, conserve toujours bon pied, bon oeil. Depuis 1976, il habite ce coin de Sud‑Ouest qu'il avait gardé dans son coeur pour sa beauté et la clémence de son climat hivernal. Et c'est avec une étonnante précision qu'il raconte l'exil forcé auquel il prit part, à 15 ans, avec ses parents. « C'était le vendredi premier septembre 1939. De nombreux Alsaciens ,demeurant dans les communes situées le long de la ligne Maginot et sur les bords du Rhin furent contraints de quitter leurs villages avec des bagages légers et quelques vivres pour une destination inconnue». Parmi eux, il y avait 520 Dessenheimois (344 adultes et 176 enfants). Ils prirent place dans le long convoi de réfugiés et de chariots tirés par des chevaux qui se mit en route vers 16 h 3O. Fernand Meyer se souvient: «La première halte intervint au bout de 10 km de marche, dans le village de Stindhoffen. Le lendemain, nous sommes repartis en direction de Colmar mais nous avons dû contourner la ville par le Nord. Nous sommes arrivés à Kientzheim, village viticole, vers midi pour une halte de trois jours. Le mardi 5 au matin, nous nous sommes
rendus à la gare de Bennwihr pour prendre place dans des wagons à bestiaux avec pour seul confort des bottes de paille, sans toilettes ni éclairage. Vers midi, le train s'ébranlait en direction du Sud‑Ouest de la France». Un voyage de deux jours, dans des conditions extrêmes qui devait conduire le convoi jusqu'en gare de Marmande. Là, camions et voitures réquisitionnés attendaient pour un ultime voyage dont Cocumont fut le terminus. La liste nominative fait état de 514 personnes qui arrivèrent dans la commune aux environs de 21 h. Tout un village, à l'exception de six personnes, réfugié dans ce coin de Gascogne. «Pour notre première nuit à Cocumont, nous avons été logés à la mairie, à l'école, au couvent et même au salon de coiffure Darqué.
Ce n'est que le lendemain que nous avons été répartis dans les familles». Et là, ils y resteront un an et trois semaines exactement. Pendant ce long séjour forcé, ils participèrent aux travaux des champs, notamment aux vendanges de 1939 et de 1940. «Au printemps 1940,12 familles d'agriculteurs alsaciens ont quitté la région pour la Normandie. Ils seront les premiers à rejoindre Dessenheim en juillet 1940, les autres ne
rentreront définitivement au pays que le 30 septembre ... ». Depuis, Fernand a fait la route séparant l'Alsace de la Gascogne maintes et maintes fois et dans les deux sens. Mais en voiture et pour son plaisir... Le plaisir de transporter les nouvelles du Sud, découpées dans «Le Républicain» aux amis du Nord et vice‑versa. Le plaisir de prolonger le souvenir d'une aventure humaine faite de larmes, d'espoir et... de reconnaissance. Jean‑Luc ARMAND. |